L'assaut
L'assaut
L’affaire est déjà ancienne (1994), mais elle fit du bruit, au propre et au figuré, lorsque le GIGN, comme chacun s’en souvient, monta effectivement « à l’assaut » d’un Airbus sur l’aéroport de Marignane. Elle fournit un bel exemple d’organisation et de courage de la part d’une équipe soudée où « il n’y a pas de seconds rôles ». Elle est décrite par le menu, minute par minute, et même seconde par seconde au moment du déclenchement de la phase active, précédée par une préparation minutieuse conduite à Satory, puis à Palma de Majorque. En effet, on ne connaissait pas à l’avance le lieu (ni même l’opportunité) de l’intervention et il fallait tenir compte à la fois des « susceptibilités des autorités d’outre Méditerranée » et des hésitations de nos politiques pratiquant « un conditionnel qu’ils emploient à merveille », surtout à quatre mois d’une élection présidentielle.
Sans préoccupation littéraire particulière, le récit est alerte, haletant même, bien que coupé par moments de retours en arrière et d’évocations qui ont le mérite d’éclairer le contexte. À l’occasion du déroulement de ce bel exploit de Noël raconté par « un de ceux qui l’ont vécu », le lecteur découvrira avec intérêt les éléments du succès final, acquis toutefois au prix de pas mal de casse – heureusement non mortelle – chez les nôtres. D’abord, les traits qui caractérisent en général les formations militaires d’élite, comme la répartition judicieuse des missions individuelles, la rapidité de mise sur pied, une solidarité allant jusqu’à la fraternité, une disponibilité qui fait rejoindre en hâte au moindre signal les permissionnaires abandonnant famille et agapes du réveillon. Mais aussi les particularités de cette unité originale (où chacun est identifié par son prénom… ou son surnom), comme la négociation prioritaire par rapport à l’emploi de la force, le poids des équipements, l’adaptation de l’armement, le rôle des tireurs d’élite… et surtout cet entraînement exigeant et permanent grâce auquel, nos gaillards connaissent par cœur la disposition interne de l’avion qu’ils s’apprêtent à attaquer.
Belle propagande certes pour nos chers pandores, à condition que les jeunes candidats n’aillent pas s’imaginer que l’arme se résume aux bolides des pelotons d’autoroute, à la haute montagne et aux « quarts d’heure de guerre » suivis depuis les cabinets parisiens ; un hommage appuyé rendu au fondateur (et préfacier) Christian Prouteau ; une manifestation d’orgueil bien légitime… On se permettra tout de même une sérieuse critique : est-il opportun de décrire avec autant de précision une telle opération ? Car si nous décidions de détourner un Airbus, notre premier travail serait assurément de consulter ligne par ligne l’ouvrage de Roland Montis ! ♦