Défense en France - Un meilleur contrôle par le Parlement des questions de défense et de sécurité
Extraits de la « Proposition de loi constitutionnelle visant à un meilleur contrôle par le Parlement des questions de défense et de sécurité », présentée le 3 décembre 2007, par M. Guy Tessier (1).
Exposé des motifs
…En effet, du fait de la traditionnelle et multiséculaire primauté de l’exécutif dans la conduite des relations internationales, la marginalisation du Parlement dans le domaine de la défense nationale n’est pas un phénomène nouveau en droit constitutionnel français, puisque contrairement aux idées reçues ce phénomène se retrouvait sous les IIIe et IVe Républiques…
Ainsi… l’actuelle réforme de nos institutions souhaitée par le président de la République… doit… permettre au Parlement de recouvrer ses prérogatives originelles d’information, d’autorisation, de vote et de contrôle de l’action de l’exécutif y compris dans les domaines de la défense et de la sécurité nationales.
… nous pouvons dégager quatre priorités afin de permettre un meilleur contrôle par le Parlement des questions de défense :
En premier lieu, il convient de renforcer les pouvoirs du Parlement en matière d’information…
C’est pourquoi je propose que l’on puisse fournir cette information sur l’existence et le contenu des traités aux seuls membres des bureaux des commissions de défense et que, dans la même optique, les présidents des commissions de défense de l’Assemblée nationale et du Sénat deviennent membres du Conseil de sécurité nationale, rassemblés sous la présidence du chef de l’État.
Dans un deuxième temps, il nous paraît essentiel que le Parlement puisse être mieux informé au sujet de la signature des grands contrats d’armement…
C’est pourquoi je propose qu’au-delà d’un certain seuil d’acquisition, de 25 millions d’euros par exemple, l’information des présidents de commission des finances et de défense, voire des bureaux de ces deux commissions des deux assemblées soit déclenchée automatiquement.
La troisième priorité réside dans le fait d’associer le Parlement à la décision en cas d’emploi de la force armée…
C’est pourquoi je suggère l’adjonction à l’article 35 d’un second alinéa qui prévoit que le Parlement soit informé de toute intervention des forces armées de la France à l’extérieur du territoire de la République au plus tard huit jours après leur déclenchement, et que cette déclaration soit suivie d’un débat sans vote.
Les Opex dans lesquelles notre pays s’engage s’inscrivant généralement dans le temps, je propose que tous les trois mois le Gouvernement informe le Parlement de la situation de nos troupes à l’étranger.
Enfin, la dernière priorité est celle du renforcement par le Parlement du contrôle de l’action de l’exécutif, notamment en matière de nominations de certains hauts responsables militaires et civils de la défense nationale…
C’est pourquoi je propose que… les commissions de défense de l’Assemblée nationale et du Sénat puissent émettre un avis rendu public avant la nomination du chef d’état-major des armées, du directeur des affaires stratégiques, du délégué général pour l’armement ainsi que du secrétaire général de la défense nationale.
…
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
Article 1er
Il est inséré dans l’article 15 de la Constitution un second alinéa ainsi rédigé :
« Il est institué un Conseil de sécurité nationale composé, sous la présidence du président de la République, du Premier ministre, du ministre des Affaires étrangères, du ministre de l’Intérieur, du ministre de la Défense, du ministre de l’Économie et des Finances, et des présidents des Commissions de la défense de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le président du comité peut, en outre, convoquer pour être entendue par le comité toute personnalité en raison de sa compétence. Une loi organique précise les compétences et les modalités de fonctionnement de ce Conseil de sécurité nationale ».
Article 2
Il est inséré dans l’article 53 de la Constitution un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« Le Parlement est informé des traités de paix, traités d’alliance, de non-agression, d’assistance mutuelle et des accords de défense. En ce domaine, les prérogatives du Parlement sont exercées par une structure restreinte composée des seuls membres de bureaux des commissions de défense de l’Assemblée nationale et du Sénat. »
Article 3
Il est inséré dans la Constitution un article 24-1 ainsi rédigé :
« Art. 24-1. – Le Parlement vote le budget de la défense et les lois de programmation militaires. Il est tenu informé des contrats d’armement contractés par la France quand ces derniers dépassent les 25 millions d’euros ».
« Par l’intermédiaire des commissions de défense et de la sécurité nationales de l’Assemblée nationale et du Sénat, il en surveille l’exécution et la bonne gestion par le Gouvernement dans les conditions fixées par une loi organique ».
« Pour les affaires touchant à la sécurité de l’État, les prérogatives du Parlement peuvent être exercées par une structure restreinte ».
Article 4
Dans l’article 35 de la Constitution, le mot : « guerre » est remplacé par l’expression : « conflit armé international ».
Article 5
À l’article 35 de la Constitution est ajouté un second alinéa ainsi rédigé :
« Toute intervention des forces armées de la France à l’extérieur du territoire de la République fait l’objet d’une déclaration devant le Parlement au plus tard huit jours après son déclenchement. Cette déclaration est suivie d’un débat sans vote. Tous les trois mois, le gouvernement informe le Parlement de la situation de ses forces armées à l’extérieur du territoire ».
Article 6
Au 3e alinéa de l’article 13 de la Constitution, les mots : « Les conseillers d’État, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les conseillers maîtres à la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, les officiers généraux, les recteurs des académies, les directeurs des administrations centrales sont nommés en conseil des ministres » sont remplacés par :
« Les conseillers d’État, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les conseillers-maîtres à la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, le chef d’état-major des armées, le secrétaire général de la défense nationale, le directeur des affaires stratégiques, le délégué général pour l’armement, les recteurs des académies, les directeurs des administrations centrales sont nommés en Conseil des ministres, après avis conforme adopté à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés par une commission mixte réunissant les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ».
(1) www.assemblee-nationale.fr/13/propositions/pion0350.asp