Les réduits insulaires chinois
Dès que se déclencha la grande invasion des armées communistes du Sud du Yang-Tsé, la presse évoqua aussitôt l’éventualité, aujourd’hui réalisée, d’un ultime repli du gouvernement de Tchang-Kai-Chek dans l’Île de Formose, et ainsi nous avons vu reparaître au premier plan de l’actualité, un « cas concret » de cette stratégie insulaire dont nous avons ici même essayé d’esquisser certains aspects (1). Compte tenu de toutes les précautions de bon sens qui s’imposent dans le maniement de la matière historique en pareil cas, il nous paraît qu’une rapide analyse du rôle joué dans le passé par les îles chinoises peut nous aider à mieux comprendre les événements en cours sur ce théâtre.
Nous constatons que ces îles ont joué un rôle considérable dans la stratégie intérieure et extérieure de ce pays depuis le XVIe siècle. C’est d’abord par réaction contre les empiétements territoriaux des Portugais que le Gouvernement chinois inaugura à leur endroit la stratégie des comptoirs insulaires. En 1557, en effet, ils furent refoulés à Macao, à l’extrémité d’une presqu’île de l’île Hiang-Chan près de Canton où ils avaient tenté de s’établir à plusieurs reprises depuis 1536. En, même temps ils furent priés d’évacuer Ning Po dans le Tché Kiang où ils s’étaient comportés comme en pays conquis.
La formule du comptoir insulaire fut acceptée par la suite à la fois par les Nations européennes et par la Chine et le Japon. Les premières, avant tout puissances maritimes, y voyaient des positions faciles à défendre contre des surprises pouvant provenir de la terre et les empires extrême-orientaux, jaloux de leur indépendance et désireux de limiter les relations de leurs sujets avec les étrangers, pouvaient par ce procédé les tenir en quarantaine dans leurs îlots et maintenir les relations avec eux sur un plan strictement commercial. La réaction du Japon contre l’influence idéologique européenne fut encore plus brutale puisque, en 1638, tous les Japonais convertis au christianisme furent massacrés et que les comptoirs européens établis à Firando furent détruits. Seuls les Hollandais furent autorisés, au prix de nombreuses vexations, à conserver un comptoir insulaire dans la petite île de Désima en rade de Nagasaki.
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