L’implantation d’une base militaire française dans le Golfe, positionne la France dans une région d’importance stratégique. Cette zone est, avec le détroit d’Ormuz, le point de passage obligé de plus de la moitié des hydrocarbures du monde. Malgré la modestie des moyens déployés sur le sol émirati, la France entend montrer son engagement dans cette région sensible.
Enjeux d'une implantation militaire française dans le Golfe
The challenges of French military implantation in the Gulf
The implantation of a French military base in the Gulf places France in a strategically important region. With the Strait of Hormuz, this zone is the unavoidable route for half the world’s fuel oil. Notwith-standing the modest size of its deployment on Emirate soil, France intends to show its commitment in this sensitive area.
À la suite de la découverte de gisements de pétrole dès le début du XXe siècle, cette zone fut convoitée très tôt et se retrouva rapidement au cœur des enjeux énergétiques mondiaux. Entourée de huit États, débouchant sur la mer d’Oman et l’océan Indien par le détroit d’Ormuz, le golfe Persique est une mer semi fermée composée de fonds marins peu profonds et riches en hydrocarbures. D’une longueur de 990 km et d’une largeur comprise entre 65 et 338 km pour sa partie la plus courte, le « Golfe » couvre une surface estimée à 240 000 km² soit environ la superficie de la Roumanie. Situé entre l’Iran et Oman, le détroit d’Ormuz se trouve à proximité des principales infrastructures terrestres iraniennes, incluant les plus grands ports, les axes de chemins de fer, ainsi que d’importantes bases navales comme Bandar Abbas. Près de 17 millions de barils quotidiens transitent par ce détroit ce qui équivaut à plus de 50 supertankers par jour, tous à la vue et à la portée de la marine iranienne. Le passage de ces navires, se fait, par l’intermédiaire de deux chenaux larges de deux milles nautiques, séparés par un chenal de même largeur. Ce Golfe abrite également près de 65 à 75 % des réserves de pétrole confirmées et environ 35 à 50 % des réserves de gaz de la planète. Il est important de noter également que près de 88 % des exportations des pays du Golfe (Iran, Koweït, Irak, Émirats arabes unis, Bahreïn, Qatar et Arabie saoudite) passent par le détroit d’Ormuz, c’est dire l’importance pour l’Iran et les pays voisins de cette artère maritime pour leurs économies nationales respectives. Précisons qu’au travers de ce détroit transitent près de 24 % des importations pétrolières américaines (146 millions de tonnes), 40 % de celles de la Chine (50 millions), 46 % de celles de l’Union européenne (244 millions) et 80 % de celles du Japon (208 millions). Déjà, à l’époque du Schah, ce dernier disait du détroit d’Ormuz, qu’il était « la veine jugulaire de l’Occident ».
En plus d’être la principale zone de production et de réserve d’hydrocarbures de la planète, le Golfe agit comme une frontière délimitant les deux principaux courants de l’islam que sont le sunnisme et le chiisme. Sur le plan religieux, « le sunnisme est majoritairement pratiqué sur la rive nord du Golfe et par des minorités arabophones de la côte iranienne. Inversement, dans la plupart des populations installées sur la rive sud, existent aussi des minorités chiites alors que le chiisme est la religion d’état de l’Iran depuis le XVIe siècle ».
Quel avantage pour une base française dans le Golfe ?
Signée par un mémorandum commun daté du 15 janvier 2008, par le ministre de la Défense Hervé Morin, l’implantation d’une base interarmées française désignée IMFEAU, dans cette région constitue une nouveauté. Elle est, en effet, la première implantation française à l’étranger depuis la fin de l’ère coloniale dans les années 60. Inaugurée par le président français Nicolas Sarkozy, le mardi 26 mai 2009, cette implantation valide donc les nouvelles orientations du Livre blanc qui distingue les zones prioritaires des forces armées françaises. Ainsi, « la mer Méditerranée, le golfe Arabo-Persique et l’océan Indien » sont considérés comme prioritaires dans le processus de ré-articulation du dispositif militaire français. D’ailleurs, dès l’annonce de cette installation, la réponse iranienne n’a pas tardé. L’ambassadeur de France à Téhéran a été convoqué et s’est vu notifier l’opposition des autorités iraniennes à ce projet. L’Iran a d’ailleurs pour sa part, posté des troupes de Pasdaran, ainsi que des navires de combat, dont un sous-marin, dans le port érythréen d’Assab, non loin du détroit stratégique de Bab-el-Mandeb. L’objectif de cette implantation, est de pouvoir, à son tour, exercer une dissuasion à l’encontre des puissances occidentales, françaises et américaines au travers de la base de Djibouti, mais également à l’encontre de certains États arabes de la région dont l’Égypte, l’Arabie saoudite et le Yémen.
Il reste 67 % de l'article à lire
Plan de l'article