Secrétaire d'État auprès du ministre de la Défense, chargée à ce titre de ces questions souvent complexes que sont les réserves, les écoles, la protection des populations, la féminisation, l'auteure s'intéresse en fait depuis de nombreuses années à cet esprit de défense qu'elle estime indispensable à la cohésion nationale. Elle nous fait part de ses réflexions sur ce sujet qui semble d'ailleurs avoir trouvé un regain d'intérêt auprès des Français.
Réflexions sur l'esprit de défense
Pour qui vient de la société civile, et qui a eu la chance d’établir une relation privilégiée avec le monde multiforme de la jeunesse et des associations, notre pays semble vivre dans un paradoxe permanent : individualiste, certes, à l’image de ses 36 000 communes dont le nombre étonne nos voisins, avec des corporatismes forts, des cloisonnements, des alvéoles, mais en même temps capable de susciter dans tous les plis et replis du territoire des élans de bonne volonté et d’énergie, des réseaux d’amitié et de compagnonnage, fondés par une commune action.
Curieux individualisme que cette aptitude particulière à créer, par association, ce qui fut la préfiguration de nos services publics. La contradiction n’est-elle pas plus grande encore lorsqu’on analyse, tout au long de l’histoire, l’ardeur de ce pays à se défendre, au prix de l’invention en période tragique pour son indépendance, d’un devoir commun, la conscription.
Il est intéressant de conserver en mémoire cet arrière-plan lorsqu’on constate, depuis les armées, le regain de réflexions au cours des dernières années sur l’esprit de défense. À travers les travaux menés dans des cercles nombreux : universités, parlement, ministères, associations de réservistes ou de protection civile, semble percer une inquiétude, les Français ne sont-ils pas sur le point de s’endormir, à l’abri de la dissuasion nucléaire, et entre les quatre murs du chacun pour soi ? Ce à quoi le ministre de la Défense Charles Hernu répond à plusieurs reprises, lors des débats parlementaires, ou lors des sessions de l’IHEDN en exposant la stratégie française qui est celle de la dissuasion globale, laquelle s’appuie sur la volonté de défense de la nation tout entière : « La défense forme un tout ; ce n’est pas le domaine particulier du ministre de la Défense ; tous les ministres ont, chacun dans sa partie, leur rôle à jouer, pour contribuer à la défense du pays en temps de guerre mais aussi dès le temps de paix : éducation, plan, intérieur, économie… ». L’élargissement du champ de la réflexion est ainsi tracé, ce qui permet au secrétaire d’État Jean Gatel d’écrire le 4 mai 1984 dans le journal Le Monde : « Le président de la République a lui-même clairement indiqué que nos armes les plus perfectionnées n’étaient jamais que des matériaux inertes et vains sans… la détermination de tout un peuple à se défendre. N’est-il donc pas urgent de renforcer l’esprit de défense ? »
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