Dans la livraison de mars 1985, l'auteur nous avait fait connaître ses réflexions sur les perspectives d'évolution de la dissuasion française. C'est à nouveau ce sujet qu'il aborde brièvement ici, en notant toutefois « le cheminement malaisé, étroit, mais praticable, que suit la dissuasion du faible au fort », et en insistant justement sur l'indispensable capacité technologique qu'il nous faut acquérir. D'ailleurs, les moyens souhaitables de notre politique de défense feront l'objet d'un prochain texte.
La dissuasion aux abois ?
Chacun sait ou comprend que la défense, comme tout organe vivant, évolue, et doit évoluer, au rythme des techniques et de l’environnement géopolitique, sous peine de présenter des schémas caducs aux défis qui lui sont proposés. Mais si les outils changent, comme peut changer l’art de les utiliser, la philosophie même de notre concept stratégique doit-elle être mise en cause ? Combien de voix s’élèvent pour ce faire, innocentes, mal informées, obtuses, intéressées, subversives, stipendiées, inquiètes ou naïves ? À les entendre, la dissuasion est surannée et dépassée.
Qu’est-ce que la dissuasion, que l’on réduit trop souvent à sa composante nucléaire en confondant sa partie avec le tout ? Comment fonctionne-t-elle ? Quels en sont les principes, les moyens, les tactiques ? Pourquoi la condamner comme si elle était le péché suprême de l’humanité ? Il me paraît nécessaire de répondre brièvement à ces questions de manière à mieux faire comprendre les principes de la défense de la France, ceux de son évolution actuelle et irréversible vers une dimension plus européenne et surtout la nécessité de la mettre à jour inlassablement, opiniâtrement, sans faire d’impasse sur l’une ou l’autre de ses composantes.
La dissuasion s’oppose à la contrainte comme la paix s’oppose à la guerre
Où il y a vie, il y a conflits. Que ceux-ci soient menés au plus profond de nos êtres ou qu’ils mettent en cause des groupes sociaux ou des États pour les résoudre, il y a deux grandes possibilités : soit être contraint par votre adversaire de vous soumettre à ses fins ; soit le dissuader de tenter toute action contre vous, en lui faisant remarquer que le jeu n’en vaut pas la chandelle, ou bien en lui démontrant qu’il se tuera s’il vient vous attaquer.
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