Politique et diplomatie - Le fait pétrolier ou l'effritement des modèles Nord-Sud
En octobre 1985, les deux compagnies Elf et CFP-Total concluent avec l’Arabie Saoudite de nouveaux accords de fourniture de pétrole brut ; c’est l’abandon du fameux « contrat Jobert », conclu à la fin de 1973, au lendemain du premier choc pétrolier, afin d’organiser sur des fondements exemplaires les rapports d’un pays du Nord et d’un pays du Sud.
En ce même automne 1985, éclate la crise de l’étain : l’un des plus vieux, des plus complets dispositifs dans le domaine des matières premières, se disloque. Ces deux événements, parmi d’autres, annoncent la fin d’une certaine vision, enfermant les rapports Nord-Sud dans une alternative aussi séduisante que manichéenne : confrontation ou dialogue. Mais peut-être le Nord et le Sud ne sont-ils que des représentations, des abstractions, fruits précaires des tiers mondismes et des chocs pétroliers…
Au fond, chaque décennie est condamnée à annihiler les rêves, les illusions de la décennie précédente. Les années 60 enterrent la guerre froide des années 50 ; l’Ouest et l’Est ne s’affronteront pas en une sorte d’apocalypse, ils vivront ensemble dans la coopération, le malentendu et la ruse. La fin des années 70 jette à son tour, dans les poubelles de l’histoire, deux des plus grands mythes qu’ait produits l’après-guerre d’abord le Vietnam, cette lutte de la jeunesse du monde contre le cynisme du Pentagone, se révèle être aussi la victoire d’une volonté froide, obstinée de domination du Tonkin sur la trop nonchalante Indochine ; ensuite la détente, les échanges comme armes de la paix : le commerce, même l’interdépendance ne font pas disparaître les idéologies. À leur tour, les années 80 à la fois inventent ces vérités (qui ne seront bientôt qu’illusions) et évacuent des schémas défraîchis, vidés de toute force.
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