Le désarmement est un sujet particulièrement important actuellement, mais les discussions portent essentiellement sur les armes nucléaires. En corollaire, sont naturellement évoqués les armements conventionnels, chimiques, biologiques, ne serait-ce que parce que, dans ces domaines, l'Europe n'est pas, loin s'en faut, au même niveau que le Pacte de Varsovie. Mais qu'en est-il des armements navals, qui ne sont jamais abordés alors que l'URSS s'est constituée une flotte considérable en deux décennies ? C'est la question à laquelle s'efforce de répondre l'auteur.
Une limitation des armements navals est-elle possible ?
#1L’entreprise du désarmement a connu au cours des deux dernières décennies une croissance parallèle à celle des armements ; ce qui tendrait à démontrer son inefficacité. De multiples négociations ont eu lieu, dans les domaines les plus divers : catégorielles à propos des armements nucléaires ou des armes bactériologiques, régionales, relatives à l’Europe, à l’Amérique, à l’Antarctique… Mais cette action a jusqu’à présent oublié les armements navals. Ceux-ci n’ont été touchés qu’indirectement par le biais de mesures de limitation des armements stratégiques — et donc de leur composante embarquée sur des sous-marins — ou de démilitarisation ou de dénucléarisation de certaines régions et de leurs eaux adjacentes. Il n’y a pas eu de mesures de limitation des armements navals en tant que tels.
Une telle lacune peut surprendre, car c’est dans ce domaine que le désarmement a obtenu ses seuls résultats notables dans l’entre-deux-guerres avec les traités navals de Washington et de Londres. Elle s’explique par le contexte particulier de l’après-Deuxième-Guerre mondiale. D’abord, la guerre froide interdisait toute négociation. Ensuite, la marine américaine régnait sans partage sur les mers, tandis que la marine soviétique ne sortait pas de ses ports ; dans ces conditions, il n’y avait rien à négocier : les États-Unis n’avaient aucune raison de consentir à une quelconque limitation dans un domaine où leur supériorité était éclatante, et l’Union Soviétique n’avait aucune contrepartie à offrir.
À partir de la fin des années 60, cette situation a commencé à évoluer avec le déclin quantitatif de la marine américaine, provoqué par le retrait massif des unités construites durant la Deuxième Guerre mondiale, et la montée de la puissance maritime soviétique. Mais les négociations SALT sur les armements stratégiques et MBFR sur l’équilibre des forces en Europe ont alors accaparé l’attention. Un regain d’intérêt s’est toutefois manifesté à l’égard de la limitation des armements navals depuis le début des années 80. Les Nations unies se sont saisies du dossier et l’URSS a fait plusieurs propositions en ce sens. Mais à supposer que des négociations pussent s’ouvrir, leur aboutissement serait hypothétique. L’environnement n’est plus celui de Washington et de Londres (1). Des transformations d’une ampleur sans précédent ont affecté le système stratégique depuis 1945 et rendu des mesures de limitation très difficiles tant d’un point de vue technique que d’un point de vue politique.
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