L'information japonaise scientifique et technique est apparue, il y a six ans, comme un gisement inexploité. À cause de l'opacité de la langue japonaise persiste l'impression, même dans les milieux intéressés par le recueil, que ce gisement recèle toutes sortes de produits rares, et l'on est porté à traduire abondamment pour voir tout. L'opacité est seulement un phénomène de langue rare ; traduire est cher. On gagnerait à former des « ingénieurs en japonais » qui jugent d'un coup d'œil ce qui vaut la peine d'être traduit.
Science et défense - Le cas de l'information scientifique et technique japonaise
La première conférence internationale sur l’information japonaise s’est tenue à l’université de Warwick, à Coventry, au début de septembre 1987, sous le patronage de la British Library - Japanese Information Service et de plusieurs autres organisations renommées (1). L’idée qu’il y a des perles cachées dans une grande masse d’informations scientifiques et techniques japonaises naturellement opaque pour les Occidentaux, et qu’on ne fait pas ce qu’il faut pour les découvrir, émeut les responsables de la politique industrielle ainsi que les bibliothécaires non japonologues qui voient passer cette information. En Amérique, la prise de conscience de ce qu’on a appelé « déséquilibre de l’information » (2) a provoqué un sursaut national ; il en est résulté un ordre présidentiel à l’intention du Department of Commerce et de la National Science Foundation, ainsi qu’une loi sur l’information technique japonaise pour entraîner la nation à moissonner cette information. Maintenant l’Europe, à son tour, paraît subir le contrecoup de ce sursaut américain.
La conférence de Warwick a montré que de grandes organisations américaines, certaines d’entre elles publiques comme NTIS, d’autres privées comme le MIT-Japan Science and Technology Program, sont entrées en action pour consacrer au recueil et à l’exploitation de l’information technique japonaise, contenue dans les journaux, les revues techniques et les bases de données, des moyens en hommes dépassant ceux que pourraient offrir les japonologues eux-mêmes. Qui plus est, des responsables de la politique américaine se sont convaincus qu’il faudrait que tous les Américains, que leurs contacts ou leurs déplacements mettent en situation d’entrevoir l’information technique japonaise, contribuent à la recueillir. L’opération revêt un autre caractère que ce qui est demandé aux attachés scientifiques en résidence, parce que l’ordre de grandeur diffère. Il ne s’agit plus seulement de faire un certain nombre d’analyses approfondies dans divers domaines où on s’attend à des progrès techniques, mais de mobiliser des volontaires pour la recherche de l’information. Le « déséquilibre » échappe au contrôle des japonologues qui l’ont laissé s’établir ; il est maintenant l’affaire de tous, bien que dans la plupart des cas il requière absolument le concours des japonologues comme traducteurs.
C’est un rapport de Gibson et Kunkel (3) et le livre (4) que ces deux auteurs publièrent par la suite, en 1981, qui soulevèrent l’amour-propre des Américains. Gibson et Kunkel identifièrent 9 116 titres japonais de publications périodiques ou occasionnelles, dont seulement 1 732 (soit 19 %) sont entrés dans des bibliographies occidentales (souvent un résumé — car 71 % des 1 732 titres japonais repérés se trouvent pris en compte parce que les éditeurs japonais eux-mêmes fournissent un résumé en anglais — et dans les autres cas une simple indexation).
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