L'auteur vient de commander un aviso-escorteur dans l'océan Indien. Il nous présente une synthèse, d'une part des événements qui ont conduit l'Iran et l'Irak à étendre leur guerre au golfe Arabo-Persique, d'autre part des opérations elles-mêmes. Ce témoignage d'un « spectateur-acteur » du conflit est fort bienvenu au moment où la situation dans cette région semble évoluer vers le retour à la paix.
Analyse de la guerre du Golfe
Le 22 septembre 1980 la guerre éclate entre l’Iran et l’Irak, entre le régime autoritaire du président Sadam Hussein et la république des mollahs qui tient son autorité d’une révolution récente. Ce conflit, dont chacun se rejette la responsabilité, est le résultat d’un antagonisme ancien entre Arabes et Persans, différents par la race, unis par une religion dont l’intolérance exacerbe les nuances. Après quelques succès initiaux de l’Irak, la guerre s’enlise dans les marais du Chatt al-Arab et les hauteurs du Kurdistan, les Iraniens grignotant progressivement quelques mètres carrés de terrain par des offensives coûteuses en vies humaines. Le conflit stigmatise la haine entre le président Sadam Hussein et l’ayatollah Khomeyni dont la ténacité n’a d’égale que la longévité. L’armée irakienne compense son infériorité numérique par un armement moderne et surabondant ; l’armée iranienne masque sa pauvreté par un enrôlement massif de hordes fanatiques.
Cette guerre épuise les Irakiens qui souhaiteraient y mettre un terme, mais pour les Iraniens, celui-ci ne peut venir que de l’anéantissement ou de l’humiliation de l’adversaire. Ils jouent la carte de l’agressé dans l’« Iraqi imposed war ». Ils savent que le temps travaille en leur faveur. Ils tirent de cette guerre la consolidation d’une révolution chancelante et vieillissante. Ils pensent pouvoir se procurer tôt ou tard les armements qui leur font défaut auprès de fournisseurs cupides. Ils attendent en lançant périodiquement leurs divisions à l’assaut pour grappiller quelques mètres de front qu’ils savent habilement transformer en kilomètres de communiqués victorieux, ciment de l’unité nationale.
De la guerre terrestre à la guerre du Golfe
Assez vite, les Irakiens comprennent qu’ils ne peuvent forcer la décision à terre. Ils mettent alors au point une stratégie de contournement. Ils commencent par sauter par-dessus le front pour aller bombarder les arrières de l’ennemi, profitant de la puissance que leur procure une aviation qui possède la maîtrise de l’air. C’est la guerre des villes. L’Iran monte en épingle chaque bombardement et parvient à se concilier les faveurs de l’opinion internationale, à faire jeter l’opprobre sur l’Irak accusé de faire des milliers de victimes innocentes avec des armements réprouvés. L’Iran maîtrise mieux que l’Irak l’information.
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