Un club de réflexion lyonnais, animé par l'auteur, s'est interrogé sur la place des régions françaises dans l'Europe d'aujourd'hui… et de demain. Cette étude, effectuée au moment où paraissait l'article de notre collaborateur Bernard Guillerez (mai 1989), auquel sont empruntées quelques formules, permettra de prolonger la réflexion sur un sujet quelque peu négligé jusqu'ici en France, mais qui mérite une attention sereine.
L'Europe et les régions
Rhône-Alpes, une « non-région » ? Historiquement, autour du Lyonnais, des morceaux de quatre grandes provinces : Dauphiné, Savoie, Bourgogne, Languedoc, avec chacune leur culture. Économiquement, quoi de commun entre les traditions industrielles du Bassin stéphanois, celles du Lyonnais, du Grésivaudan et l’économie rurale du Dauphiné ? S’y ajoutent l’héritage « contestataire » de Grenoble, le fier souvenir de la capitale des Gaules, le tropisme « lémanique » de la Haute-Savoie. Administrativement : 8 départements, naturellement soucieux de leurs prérogatives, et 2 874 communes dont la moitié comptent moins de 500 habitants (6,8 % de la population régionale) et ne peuvent investir. La rivalité traditionnelle Lyon-Grenoble s’avive de la compétition comme pôle international de recherche-développement, alors que des synergies sont possibles. Au total pas de ville capitale, fédératrice reconnue d’un réseau de villes d’importance régionale. Pas de conscience régionale dans les populations, le sentiment d’appartenance à des collectivités plus proches prévalant.
En dépit de ces apparences, Rhône-Alpes est une entité solide : poids démographique relatif stable depuis un siècle, pérennité d’un système économique régional, transformé depuis l’expansion marchande du XVIe siècle et dont témoignent aujourd’hui l’intensité et la diversité des échanges interurbains et le solde positif de sa balance des échanges commerciaux.
Ses atouts sont connus. Deuxième région de France en population (1/10e) et en recherche avancée (9 universités, 24 grandes écoles), neuvième région d’Europe en superficie. Par-dessus tout, une exceptionnelle situation géographique de carrefour Nord-Sud et Est-Ouest. Entre l’Europe médiane alpine (la Lotharingie) et celle de l’Ouest, entre l’Europe du Nord-Ouest (la plus grande concentration urbaine et économique) et la façade méditerranéenne, en pleine « renaissance », elle est aussi un point de rencontre de trois civilisations. Cette position privilégiée vaut-elle pour l’avenir ? Ici se coupent les deux grands axes de développement de l’Europe de demain : les axes Londres-Paris-Milan et Espagne-Genève-Italie du Nord. Ici sont situés les grands gisements touristiques des Alpes et de la Côte-d’Azur, évidemment complémentaires. Pour autant, le Rhône risque de n’être plus demain la liaison obligée Nord-Méditerranée, car il s’en crée plus à l’Est, par la route, le rail et les fleuves (Rhin-Danube), pour en détourner le trafic.
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