Politique et diplomatie - Quel avenir pour l'Organisation des Nations unies ?
Depuis la fin des années 80, l’Organisation des Nations unies prend, ou reprend une position centrale dans la gestion et éventuellement le règlement des conflits. Les raisons politiques de ce « retour de l’Onu » sont connues. Du fait de la fin de l’antagonisme Est-Ouest, nombre d’affrontements du Sud, cessant d’être financés ou armés par les deux supergrands, s’acheminent vers des tentatives de solution ; avec le reflux du tiers-mondisme, l’Onu et surtout l’Assemblée générale cessent d’être cette machine de guerre antioccidentale, antiaméricaine qu’elle fut principalement dans la décennie 70.
Alors la vision rooseveltienne de 1945 triomphe-t-elle enfin ? Probablement non. Pour les États-Unis de Roosevelt, père des Nations unies, l’objectif était de bâtir, à l’échelle mondiale, un concert de grandes puissances ayant la garde du maintien de la paix ; d’où le Conseil de sécurité et la formule des cinq membres permanents, dotés chacun (selon le désir de Staline) d’un droit de veto. Ce schéma reposait sur deux conditions complémentaires qui, aujourd’hui, constituent autant de sources d’interrogation. D’abord, une hiérarchie simple et claire de la puissance : au sommet, les deux vrais vainqueurs de la guerre (États-Unis, Union Soviétique), certes flanqués de la Grande-Bretagne, de la Chine et de la France ; au-dessous, les autres ; or l’une des caractéristiques des années 90 réside dans la compétition entre plusieurs hiérarchies (schématiquement politico-militaires et économico-financières), sur un arrière-fond d’anarchies régionales (Yougoslavie, corne de l’Afrique…). Ensuite, un ensemble établi de puissances responsables ; au fond, dans les années 70, la détente, le dialogue américano-soviétique matérialisaient cette idée de concertation mondiale, moins certes pour promouvoir la paix que pour empêcher au moins que les luttes locales ne dégénèrent en embrasement général. Aujourd’hui le Conseil de sécurité, ses cinq membres permanents maintiennent la fiction d’un système stable, mais tant l’affaire du Golfe que la tragédie yougoslave montrent que chaque crise donne lieu au bricolage de coalitions précaires, mouvantes, tentant d’ajuster les réalités politiques, militaires et financières.
Alors pourquoi ce « retour de l’Onu » ? Résulte-t-il seulement des circonstances, d’une sorte de consensus pour liquider les conflits « archaïques » qui se sont développés au cours des dernières décennies ? Ou ce retour s’inscrit-il dans les transformations de fond du système mondial, dans la recherche de nouveaux mécanismes de sécurité ? Sans doute ces deux dimensions s’entremêlent-elles dans la mutation en cours… D’où, pour l’Onu, des contradictions appelées à s’exaspérer entre le dispositif institutionnel, presque inchangé depuis 1945, les missions de plus en plus nombreuses et, enfin, le paysage international en plein remodelage.
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