Ce sujet fait l’objet de nombreux développements depuis quelque temps et leurs auteurs mettent en balance les avantages et inconvénients des diverses solutions proposées qui, dans l’ensemble, sont proches de celle préconisée par le général Schmitt dans notre numéro d’avril : une armée mixte. Dans ce texte, l'auteur, général commandant la 2e Division blindée (DB), rejoint cette idée en proposant l’extension et l’approfondissement du Volontariat service long (VSL).
Armée de métier ou de conscription ?
Les mutations technologiques, sociales et politiques qui caractérisent la dernière décennie du XXe siècle posent d’une manière accrue le problème de la nature des forces armées de la France dans le contexte européen. Une donnée nouvelle dicte le volume de celles-ci : ce n’est plus le potentiel démographique d’une nation qui conditionne la dimension des forces, mais le coût croissant des armements et des équipements de plus en plus perfectionnés et la part de richesse nationale que la nation accepte de consacrer à sa défense. Il en découle que les armées de masse ont vécu. Or, la France a établi la conscription à la fin du XVIIIe siècle pour recruter des troupes assez nombreuses afin de faire face à l’Europe coalisée, puis dans le courant du XXe siècle pour soutenir le conflit contre l’Allemagne. Désormais, avec la nouvelle donnée, se pose la question du maintien de la conscription ou du passage à une armée de métier.
Quels que soient les discours plus ou moins tendancieux à ce sujet, les Français n’ont que modérément admis la conscription et, d’une manière générale, ne s’y sont soumis que par nécessité. En effet, il est une constante historique : la France est bien une nation guerrière, mais pas militariste. Son histoire est bien là pour le démontrer, mais c’est plus l’entraînement des rapports de forces dans les relations internationales qui l’a conduite à mener des guerres qu’une vocation historique. Il en découle que, de toujours, la vie sous les armes n’a pas été spécifiquement recherchée par la majorité de la population.
La monarchie le savait bien. Selon les lois coutumières du royaume, elle pouvait avoir recours à la levée en masse par la mobilisation et l’envoi aux armées en campagne des milices, qu’en vertu de la tradition féodale de l’appel au service de l’ost les communes et les paroisses étaient tenues de lever. Les monarques français ne se résolurent à cette mesure extrême que deux fois, au fond de l’abîme, après avoir épuisé toutes les autres solutions, y compris celle qui consistait à offrir la paix aux conditions exigées par l’adversaire. La première fois, ce fut pour aller à Bouvines, en 1214, contre la coalition composée par le Saint Empire romain germanique, l’Angleterre et les Flamands. La seconde et dernière fois, ce fut pour envoyer le maréchal de Villars à Denain, en 1712, après que Louis XIV, sur ses vieux jours et à bout de ressources, eut fait fondre sa vaisselle d’argent. Autrement, la monarchie recrutait une armée de métier parmi des engagés ou mercenaires français et étrangers et choisissait pour la commander aussi bien des Français que des étrangers.
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