Contexte international et défense
Concevoir un Livre blanc sur la défense est, en France, un exercice singulier. C’est un acte majeur par lequel est définie une politique de défense qui vaudra pour toute la période à venir, énonce les principes stratégiques dont elle devra s’inspirer et en déduit les orientations principales à prendre pour l’ensemble des systèmes d’armes et, dans une certaine mesure, pour les structures, la posture et le format des armées.
Rien ne le montre mieux que le Livre blanc de 1972. Le président de la République et le gouvernement avaient fixé à ses auteurs le cadre politique dans lequel leurs réflexions et leurs travaux devaient se situer : il s’agissait d’assurer, en toute hypothèse, l’indépendance nationale. La stratégie de dissuasion nucléaire en était le corollaire et, à partir de là, on pouvait assigner aux diverses composantes des forces armées leur place dans le système français de défense et leurs missions. Nul doute que, pour le Livre blanc qu’il s’agit de mettre au point aujourd’hui, l’approche ne soit sensiblement différente. Quelques préalables semblent avoir été fixés par le gouvernement — le maintien de la dissuasion nucléaire, celui d’une armée « mixte » dont le recrutement se fera à la fois par la conscription et l’engagement de professionnels — mais beaucoup d’incertitudes apparaissent sur les choix politiques de la France durant les prochaines années, par exemple quant à la préservation de son indépendance nationale ou à son intégration dans une entité européenne.
On comprend donc les difficultés auxquelles la commission chargée du Livre blanc a pu se heurter, soit qu’elle ait dû anticiper sur des options politiques qui n’étaient pas, à proprement parler, de son ressort, risquant ainsi de déborder de son rôle, soit que, par la force des choses, elle ait dû se borner à inscrire ses travaux dans la suite de la politique de défense menée jusque-là. Il faut reconnaître que pour ses membres, comme pour le gouvernement qui l’a constituée, il s’agissait d’une tâche singulièrement difficile à accomplir et, à certains égards, sans précédent, tant il est vrai que le contexte international a radicalement changé ces dernières années, mais sans que l’on puisse être assuré de ce qu’il sera dans les années à venir.
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