L'Algérie et son avenir
Lorsque Bugeaud, le 29 décembre 1840, prit possession de ses pouvoirs de Gouverneur général, l’Algérie, pour nous en tenir au plan social et économique, n’était guère dans une situation enviable. Sur un territoire de 210.000 kilomètres carrés vivait clairsemée une population qui n’atteignait même pas 2 millions d’habitants. L’état sanitaire, déplorable, entraînait dans certaines villes des taux de mortalité de plus de 20 %. L’actuelle Mitidja n’était qu’un marais coupé de broussailles. Bugeaud et ses collaborateurs répartirent des terres entre civils et militaires, les marécages furent asséchés, des routes et des ports créés de toutes pièces, des villages construits. La colonisation était lancée. Quand Bugeaud quitta l’Algérie en 1847, celle-ci était désormais en mesure de prendre son essor. En sept ans, la population européenne de 28.000 âmes (dont 15.000 colons) était passée à 109.000 dont 19.000 colons. En 1822, le commerce extérieur de l’ancienne Régence accusait 6.500.000 francs à l’importation contre 1.500.000 à l’exportation ; en 1845, ces deux postes étaient montés respectivement à 99 millions et 10 millions.
Le décret de 1851 et la loi de 1867 supprimèrent toute barrière douanière avec la Métropole. Le développement économique de l’Algérie allait désormais progresser à pas de géant. De 1853 à 1913, les deux grandes productions fondamentales de céréales et de vins étaient passées de 900.000 quintaux et 11.000 hectolitres à 26 millions de quintaux et 7 millions d’hectolitres. Le mouvement des ports en tonnage métrique était passé de 1.993.140 en 1875 à 7.374.619 en 1913. Le réseau ferroviaire exploitait plus de 3.000 kilomètres en 1913 contre 296 en 1870. Enfin, de 1830 à 1913, les populations européenne et indigène passèrent respectivement de 3.228 et 2.000 000 à 752.000 et 4.700.000.
Dans les années qui suivirent la guerre de 1914-1918 et jusqu’à la crise de 1930, l’Algérie atteignit un chiffre d’importation quarante fois plus élevé que celui qu’elle avait en 1840, et ses exportations, par rapport à cette date, furent multipliées par 284 ; elle était alors le quatrième client et le cinquième fournisseur de la France. La crise de 1930, si elle eut sur ce pays, en plein équipement, le plus fâcheux retentissement, eut du moins pour effet de resserrer encore plus ses liens avec la Métropole, puisqu’à cette date l’Algérie devint le premier client et le premier fournisseur de la France, avec des chiffres respectifs de 3 milliards 300 millions et 5 milliards 800 millions de francs. Cette union devait se manifester plus complète que jamais durant les années de 1939 à 1945, pendant lesquelles nos trois départements apportèrent à la Métropole une contribution massive en hommes, et par la suite, en biens de consommation.
Il reste 90 % de l'article à lire