Politique et diplomatie - Divorces entre Nations
Voici venir le temps des divorces entre nations ! Ainsi en 1991, alors que l’Érythrée accède à l’indépendance après quarante ans de lutte contre son annexion par l’Éthiopie, la Yougoslavie puis l’Union Soviétique, ces deux prisons des peuples, éclatent. Le 31 décembre 1992, c’est la séparation « de velours » de la République tchèque et de la Slovaquie. En cet automne 1995, la question de la sécession du Québec du Canada, posée depuis la fin des années 1960, est à nouveau à l’ordre du jour (référendum sur la souveraineté le 30 octobre). À cette liste loin d’être exhaustive s’ajoutent toutes les tensions lourdes de divorces possibles : de la question kurde à celle du Cachemire, des ambitions catalanes aux aigreurs entre l’Italie du Nord et le Mezzogiorno, de la fédéralisation de la Belgique en 1993 à la vigueur du nationalisme écossais. Enfin, rien n’exclut qu’un jour les peuples dits indigènes (Indiens d’Amérique du Nord, aborigènes d’Australie, peuples esquimaux…) ne se convainquent que leur meilleure chance de survie réside dans la formation d’États qui leur soient propres.
Qu’y a-t-il de nouveau sous le soleil ? En 1947, l’indépendance des Indes s’accompagne de la partition entre l’Inde et le Pakistan, les deux portions de ce dernier rompant en 1971, avec la naissance du Bangladesh. En 1965, Singapour divorce pacifiquement de la Malaisie. Ces cassures s’inscrivent dans le sillage de la décolonisation, celle-ci se faisant le plus souvent dans le respect des divisions territoriales faites par le colonisateur, mais parfois les remettant en question, la colonisation ayant contribué à durcir certains clivages (par exemple, entre hindous et musulmans dans le sous-continent indien).
Les divorces actuels ou potentiels touchent des États aussi bien fabriqués récemment (Tchécoslovaquie et Yougoslavie, façonnées à l’issue de la Première Guerre mondiale, et — cela mérite d’être rappelé — dépecées par l’Allemagne hitlérienne, se servant des haines nationales) que des États perçus comme stables (Belgique ou… Espagne). De même, ce problème concerne aussi bien des États autoritaires ou totalitaires (Union Soviétique) que des fédérations démocratiques (Canada). Il y a donc bien une question qui se situe au-delà des structures politiques. Pourquoi cette vague de divorces, loin d’être close ?
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