Nation, bien public et intérêts privés : aux origines des nationalisations
Tout le monde vous le dira : les nationalisations sont une catégorie de la tératologie économique, comme les enfants monstrueux du bolchevisme et de la technocratie.
Parce qu’elles ont souvent coïncidé avec la présence au pouvoir de représentants des partis classés « à gauche » (Front populaire, Libération, début du premier septennat de François Mitterrand), les nationalisations en tant que forme étatique d’appropriation collective des moyens de production sont conçues comme le résultat de l’influence des doctrines socialistes, le premier pas sur l’impasse du collectivisme. Les historiens y voient également, tout spécialement dans les années 30 et 40, la marque d’une illusion « techniciste » : la croyance que l’État, dont l’engagement dans le domaine économique semble nécessaire après la faillite supposée du système libéral consécutive à la crise financière de 1929, doit réguler les mécanismes du marché, voire planifier l’économie, et pour ce faire disposer de la maîtrise de certains secteurs jugés essentiels (banques, assurances, transports, production et distribution d’énergie, etc.).
Ces deux explications traditionnelles représentent une part de la vérité, mais ne vont pas jusqu’au fond des choses. Elles ne rendent pas compte des causes premières de ce mouvement qui marque notre siècle, au moins jusqu’au début des années 80, avant d’amorcer le reflux auquel nous assistons.
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