L'auteur, jeune chercheur du laboratoire « Redéploiement industriel et innovation » de l’Université du Littoral à Dunkerque, traite des aspects techniques du renseignement, en particulier concernant les systèmes d'information.
Technologie militaire et système d'information de défense
Faut-il autoriser l’usage privé des systèmes perfectionnés de cryptographie sur l’Internet ? Le débat, instauré naguère aux États-Unis, s’amplifie et gagne de nombreux pays, notamment en Europe. La décision du président Clinton d’autoriser des firmes à vendre et exporter certaines catégories de clés cryptographiques suscite de nombreux doutes et beaucoup d’interrogations. Les dirigeants se trouvent dans une position ambiguë. D’une part, les gouvernements ne veulent pas manquer le tournant du commerce électronique et de la « révolution informationnelle » (Jean Lojkine). D’autre part, les États, en tant que garants de la défense nationale, doivent prendre garde à ne pas mettre en péril la sécurité de leur pays.
William Crowell (1996), de la National Security Agency, résume clairement la situation à laquelle les États doivent faire face : « Si nous mettons excessivement l’accent sur la sûreté et la sécurité, nous courrons le risque d’un monde ayant un trop grand accès du gouvernement avec un coût pour les individus. Si nous mettons excessivement l’accent sur le respect du secret, nous courrons le risque d’un monde avec un trop grand degré de liberté (…). Les deux extrêmes sont désagréables. Nous avons besoin de trouver un équilibre qui établisse une protection adéquate à la fois pour les individus et pour la société comme un tout ».
Si l’information devient un enjeu économique sans cesse plus important, notamment l’information scientifique et technique (Blandine Laperche, 1996), elle tient également une place de plus en plus importante dans les systèmes de défense nationale. L’information ne se limite plus aux domaines de l’espionnage et du commandement. Les systèmes de communication et les informations elles-mêmes acquièrent une dimension inconnue jusqu’à présent et révolutionnent l’art de la guerre. D’une part, l’information décisionnelle peut être partiellement décentralisée ; d’autre part, à la différence des armements classiques, les nouvelles armes (smart weapons) peuvent être améliorées sans cesse et à distance grâce à des systèmes évolutifs et au développement des flux d’informations scientifiques et techniques. La maîtrise de ceux-ci est devenue un enjeu majeur, ce qui explique que les militaires cherchent à éviter d’en perdre le contrôle. Cette place vitale de l’information engendre un processus d’intégration entre économie civile et système productif de défense, alors qu’ils s’étaient engagés à partir des années 70 dans des voies divergentes. Cependant, ce processus crée aussi de nouvelles menaces sur la mise en œuvre de la défense des pays.
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