L’ambition internationale de l’Europe semble au point mort relève l’auteur. Certes, la crise financière et budgétaire affecte en profondeur la plupart des États européens, mais la vraie question est celle du rôle stratégique de l’Union dans un monde en mutation rapide. C’est en repensant son espace géostratégique et tout d’abord son voisinage qu’elle pourra sortir de son isolement actuel.
Comprendre la paralysie européenne (1/2)
Understanding european paralysis(1/2)
The author believes that Europe’s international ambitions have stagnated. While it is true that the financial and budgetary crisis deeply affects the majority of European States, the real issue is that of the strategic role of the Union in a rapidly changing world. Its current isolation can only be broken by a new look at its geostrategic space and, above all, at its near neighbours.
Les interrogations se multiplient sur la capacité de l’Union européenne à jouer un rôle proportionnel à sa taille et à sa puissance économique. Réduite au rang de spectateur lors du Sommet de l’environnement à Copenhague, largement absente du processus de paix au Moyen-Orient, fuyant ses responsabilités en Afghanistan, délaissée par l’Administration Obama, diminuée dans ses prérogatives institutionnelles, de l’OSCE au FMI, l’Europe se sent bien seule. Le Traité de Lisbonne devait redresser les lacunes institutionnelles de l’Union en politique étrangère, insuffler une nouvelle cohérence et un regain d’énergie après plus d’une décennie de batailles fratricides. Sa mise en œuvre, certes encore récente et à bien des égards inachevée, ne suffira cependant pas à effacer les dynamiques stratégiques fondamentales qui traversent l’Europe. Dans une émergente multipolarité qu’elle avait pourtant appelée de ses vœux, l’Europe éprouve des difficultés à influencer un agenda international qui désormais semble se façonner ailleurs, tant à Washington qu’à Pékin. Son identité post-moderne, même si celle-ci relève plus d’une rhétorique officielle que d’une pratique effective, reste une exception parmi le concert des grandes puissances, sa parole et son action diplomatique s’en trouvent isolées. La familiarité du cadre atlantique ne suffit plus à assurer son consensus, et ce, d’autant plus que les États-Unis ne sont plus une puissance européenne et que l’Otan demeure trop étroite dans ses fonctions et trop limitée dans son collège pour assurer à elle seule l’efficacité de l’action collective.
La première partie de cette réflexion dresse le bilan de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union, la livraison à venir évaluera les sources des blocages actuels, tant ses origines internes que sa dimension internationale. Car la paralysie européenne n’est pas seulement le fruit de la spécificité de l’expérience européenne ou d’une identité problématique, elle est aussi et surtout le produit de l’évolution du système international.
Crise et opportunité
Certes, la crise économique qui secoue l’Europe et le monde depuis plus de deux ans ne constitue pas le contexte idéal pour renouveler une ambition internationale qui semble s’être émoussée depuis son introduction officielle en 2003. L’austérité infligée tant par les marchés que par les gouvernements affecte de manière significative tous les budgets liés aux affaires étrangères et à la défense, y compris ceux des pays qui, comme la France ou la Grande-Bretagne, avaient traditionnellement réussi à leur conserver un niveau satisfaisant (1).
Il reste 87 % de l'article à lire
Plan de l'article