Pensée militaire - Désinformation : une machine de guerre
La désinformation est une manœuvre fallacieuse qui vise à répandre des informations frelatées dans le but de manipuler l’imaginaire collectif d’une population, les gouvernants d’un pays, les responsables d’une entreprise ou les états-majors militaires. Dans cette forme de guerre de subversion, l’objectif est d’amener un groupe humain à adopter une ligne de conduite spécifique ou une autorité à prendre les décisions souhaitées par les désinformateurs. L’aspect subtil de cet art insidieux de la ruse est bien résumé par la métaphore éloquente du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev : « Comment peut-on faire avaler du poivre à un chat ? Il y a deux méthodes : la méthode capitaliste consiste à saisir l’animal par la queue, à lui ouvrir la gueule de force et à enfourner le poivre dedans. La méthode communiste, quant à elle, consiste à enduire le mammifère de poivre et, comme il se lave avec sa langue, il absorbera le condiment sans s’en apercevoir. C’est donc cela la désinformation, c’est ce que nous avalons sans nous en apercevoir ».
L’Histoire est particulièrement riche d’exemples d’individus, d’États, de firmes économiques, de sociétés humaines ou d’unités militaires sur le terrain qui, à l’image de ce chat, sont victimes sans s’en rendre compte d’une opération de duperie ou d’une action de manipulation. Le procédé est d’autant plus efficace qu’il utilise les stratagèmes les plus retors, le bluff ou le mensonge, et qu’il propage son venin à petites doses de telle sorte que la lenteur de l’empoisonnement de nos esprits amoindrit notre attention, conditionne notre comportement, altère notre jugement et affaiblit nos défenses immunitaires contre l’intoxication. La désinformation est donc bien une redoutable machine de guerre aux effets pernicieux.
Une constante de l’histoire
Les exercices de tromperie et de manipulation des esprits existent depuis des lustres. Les règles d’or de la supercherie ont été établies au IVe siècle avant JC par le penseur chinois Sun Tzu dans les treize articles de L’Art de la guerre. Quelques siècles plus tard, les Soviétiques ont érigé en dogme la notion de désinformation. Le mot provient d’ailleurs du russe desinformatsiya, un terme qui était censé désigner des pratiques capitalistes visant à l’asservissement des masses populaires. Cette idée a constitué le fil conducteur de la politique de l’URSS pendant la guerre froide. Elle avait pour objectif d’inculquer à tous les peuples du monde communiste la supériorité du régime dans lequel ils vivaient et donc de faire croire à l’absurdité du libéralisme. Pour remporter cette grande bataille idéologique, les dirigeants du Kremlin ont appliqué les préceptes ressassés par Lénine qui personnifiait la référence de l’art du faire croire.
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