À la lumière des repères de la science politique, l’auteur passe au crible les récentes crises africaines, de la Libye à la Côte d’Ivoire, et voit dans la nouvelle détermination de la communauté internationale à valider fermement la démocratie, un tournant dans l’histoire de l’Afrique.
Dynamiques africaines 2011 : le retour de l’Histoire
African dynamics in 2011: a historical turning point
With references from political science, the author puts recent African crises, from Libya to the Ivory Coast under the microscope, and sees a turning point in African history in the international community’s new determination to encourage democracy.
En 1648, c’est de la signature des traités de paix de Westphalie que naquit l’État moderne. Celui-ci joua le rôle déterminant dans les relations internationales jusqu’à l’avènement du multilatéralisme, à la création de la Société des Nations (SDN) en 1919. L’État partage alors la gestion des affaires internationales avec les organisations internationales. En 1945, la Seconde Guerre mondiale laisse place à un monde bipolaire caractérisé par la lutte entre deux camps, l’Est communiste et l’Ouest capitaliste. Il a fallu attendre 1989 pour voir s’écrouler le mur de Berlin qui les séparait, puis l’éclatement de l’URSS en 1990, fragilisant le bloc oriental. La victoire de l’idéologie libérale permit au chercheur américain Francis Fukuyama de proclamer « la fin de l’Histoire » avec la généralisation de la démocratie comme régime politique. La planétarisation de la démocratie devrait apporter la paix perpétuelle au monde, celle qu’avait tant espérée Emmanuel Kant. Cette attente fut vite relativisée par Samuel Huntington qui, en 1993, pronostiqua « le choc des civilisations ». Le 11 septembre 2001, les attaques terroristes contre les États-Unis d’Amérique ont été perçues comme la manifestation de la remise en cause de l’ordre libéral par une menace fondée sur l’extrémisme.
L’actualité africaine de ce premier semestre 2011 montre un retour fracassant de l’Histoire.
La fin de l’Histoire prédisait l’avènement de la paix car « les démocraties ne se font pas la guerre ». La démocratie occidentale dite libérale devrait donc être proposée au reste du monde comme régime idéal. Après une vingtaine d’années d’expérimentation, ce processus connaît des limites, surtout en Afrique subsaharienne et dans les pays arabes. En 2011, les démocraties libérales occidentales, avec à leur tête la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis d’Amérique, ont décidé de changer le destin de ces pays longtemps soumis à des régimes dits dictatoriaux. Ils profitent des mouvements sociaux pour inviter les gouvernants de ces régimes à partir. Pacifiquement, ou presque, la Tunisie et l’Égypte ont connu le départ de leurs Présidents. Le guide libyen a été emporté par le vent provoqué par des insurgés-rebelles constitués en Conseil national de transition (CNT) soutenu militairement par la coalition des trois leaders occidentaux cités plus haut, puis par l’Otan dont ils occupent les premiers rangs, avec « l’aval » des Nations unies entériné par la résolution 1973. Par des bombardements, ils ont facilité la tâche des insurgés qui lentement ont avancé vers Tripoli pour déloger le guide du pouvoir.
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