Gendarmerie - Les Pelotons de surveillance et d'intervention de la Gendarmerie (PSIG) : un renforcement de la Gendarmerie dans les zones périurbaines
Dans le prolongement des diverses formes de détachements opérationnels expérimentées depuis le début des années 70, les pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) ont connu, depuis leur création en novembre 1976, un développement considérable. Pour ne prendre que quelques dates, leur nombre a évolué de la manière suivante : 1978, 37 ; 1983, 112 ; 1988, 138 ; 1993, 185 ; 1998, 227.
Ces unités spécialisées implantées près des compagnies (échelon de l’arrondissement) sont apparues comme une réponse efficace aux principaux problèmes affectant la gendarmerie départementale. Selon l’instruction provisoire du 16 juin 1977 qui détermine leur organisation et leurs conditions d’emploi, leur création avait pour objectif de « répondre, par une adaptation des structures, aux nouvelles conditions d’exécution du service résultant : du développement de la violence, de la délinquance de groupe et de la mobilité sans cesse croissante des auteurs d’infractions ; de l’augmentation des tâches des brigades sans accroissement corrélatif de leurs effectifs ; de l’exigence toujours plus grande des citoyens à l’égard des services publics dont ils attendent une aide immédiate, appropriée et efficace ». Ce constat, vingt années plus tard, n’a en rien perdu de sa pertinence. Permettant « d’étoffer par des services mobiles son système de surveillance générale et d’intervenir dans les meilleures conditions possibles face à tout événement imprévu », les PSIG sont devenus une sorte de « bouée de sauvetage » de la compagnie et des brigades surchargées. Implantés principalement dans les arrondissements en proie au développement du phénomène insécuritaire (avec un effectif moyen de sept sous-officiers et neuf gendarmes auxiliaires), les PSIG, qui disposent d’équipes cynophiles, constituent une réserve d’intervention mobile disponible en permanence pour prêter main-forte aux unités de la compagnie, en se portant rapidement sur les lieux, par exemple, d’un accident de la circulation ou d’une tentative de cambriolage. Hors le temps de ces interventions, l’essentiel de leur tâche quotidienne réside dans l’accomplissement, de jour comme de nuit, de missions de surveillance générale, au moyen de patrouilles en véhicule et à pied, dans la circonscription des brigades territoriales.
À cet égard, les PSIG ont pu apparaître, dans leurs premières années d’existence, comme l’une des principales illustrations de l’avènement de ce que Hubert Lafont et Philippe Meyer ont appelé la « gendarmerie mécanique » : une formule censée traduire la tendance de l’institution, sous couvert de spécialisation et de modernisation, à privilégier l’opérationnel à la proximité, la technicité du spécialiste à la polyvalence de l’acteur de terrain, l’efficacité immédiate de l’intervention ponctuelle à l’action en profondeur par le contact permanent avec la population (1). En effet, à la différence des brigades, le PSIG exerce sa mission de surveillance générale dans un territoire assez vaste puisqu’il englobe l’ensemble de la compagnie. Dépourvu de la connaissance approfondie des lieux et des personnes qui, dans l’absolu, est l’apanage de son collègue de la brigade, le gendarme du PSIG a pu apparaître alors comme un « gendarme venu d’ailleurs », qui connaît peu de personnes et que peu de personnes connaissent. En l’absence d’une véritable implantation territoriale, le caractère limité des contacts avec la population — si ce n’est dans le cas si particulier de la répression des infractions, notamment routières — rend en partie aveugle, c’est-à-dire uniquement dissuasive, la surveillance générale exercée, le gendarme du PSIG n’obéissant, en fait, qu’à sa propre expérience ainsi qu’aux instructions formulées par son commandant d’unité, complétées, le cas échéant, par les indications transmises par le commandant de la brigade au profit de laquelle le service de surveillance générale est effectué. Par ailleurs, d’aucuns ont pu mettre en évidence que, en raison même de leur composition, les PSIG pouvaient présenter des limites d’emploi, les gendarmes auxiliaires qui représentent plus de la moitié de leur effectif ne constituant, par le caractère limité de leur formation et de leur expérience professionnelle ou bien encore par les restrictions juridiques apportées à leur utilisation, qu’un personnel d’appoint qui ne saurait en aucune mesure se substituer aux personnels d’active.
Bien que ces limites apparentes, de connaissance des lieux et des personnes, de collecte des renseignements et de contact avec la population, aient pu donner à penser que l’action des PSIG constituait une sorte d’ersatz de surveillance générale, les évolutions intervenues ces dernières années, concernant l’organisation de l’institution et de son milieu d’intervention, ont malgré tout donné raison aux promoteurs de ce type d’unité. En premier lieu, l’examen de la situation sur le terrain démontre leur parfaite insertion dans le tissu territorial de la gendarmerie : au même titre que la brigade de recherches pour ce qui est des enquêtes de police judiciaire, le PSIG a su trouver sa place dans le dispositif de la compagnie de gendarmerie en tant qu’unité spécialisée de proximité au service, en complément, en renfort des brigades territoriales. En second lieu, en raison même de sa finalité et de ses moyens, le PSIG est devenu un des principaux acteurs du dispositif, mis en place depuis 1990, de gestion départementale — par les centres opérationnels de la gendarmerie (COG) — des services et interventions de nuit. Toutefois, la justification manifeste de l’existence et du développement de ces unités semble bien se situer, à l’heure actuelle, dans le nécessaire renforcement de l’action de la gendarmerie dans les zones périurbaines. Face à ce qui apparaît comme un véritable défi pour l’institution, le PSIG contribue, aux côtés des brigades territoriales, à maintenir une présence continue et effective, de jour comme de nuit, dans ces territoires hybrides, mi-ruraux mi-urbains, oscillant entre les paisibles lotissements et les cités HLM sensibles, dans ces zones de peuplement en constante expansion particulièrement confrontées aux progrès de la délinquance et de l’insécurité (2).
Dans un autre domaine, notons pour conclure, que la transformation engagée, compte tenu de la suppression du service national, des gendarmes auxiliaires (appelés) en gendarmes adjoints (volontaires) devrait permettre de renforcer la professionnalisation de ces unités, tant il est vrai que l’accroissement de la formation (portée à quatre mois) ainsi que l’extension des attributions de ces personnels (avec la reconnaissance de la qualification d’agent de police judiciaire adjoint) devraient encore améliorer les conditions de leur action sur le terrain. ♦
(1) Le nouvel ordre gendarmique ; Seuil, 1980.
(2) « La gendarmerie et le défi de la périurbanisation », chronique « Gendarmerie » ; Défense Nationale, mai 1997.