Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche expose brièvement son approche des questions de défense et de sécurité, souligne l’impératif de cohésion nationale et rappelle la place de l’armée dans l’identité du pays.
Entretien « Défense » (1)
Defence interview No.1
The author, minister for higher education and research, gives a brief expose of his approach to matters of defence and security, underlines the need for national cohesion and reminds us of the role played by the armed forces in the identity of the country.
Depuis le dernier Livre blanc de 2008, la nouveauté relève des grandes contraintes budgétaires que nous connaissons. Parallèlement, la disparition d’une menace visible à nos frontières ne doit pas nous laisser penser que la défense puisse être une politique reléguée au second rang des priorités. La menace n’a pas disparu, elle est devenue plus complexe et plus diffuse : menace terroriste, qui a frappé nos principaux alliés (New York, Londres, Madrid), menace balistique, avec le développement du nucléaire iranien, menaces liées à nos voies d’approvisionnement énergétique (piraterie), risques de pandémies, problèmes liés au cyberespace… Il faut donc être vigilant face à une éventuelle « surprise stratégique », l’histoire regorge de guerres imprévues et nous savons la difficulté que nous avons à les prévoir, comme en témoignent les récentes révolutions arabes. Par ailleurs, l’acquis majeur de la dissuasion nucléaire doit être maintenu pour préserver nos intérêts vitaux, comme ce fut le cas tout au long de la guerre froide pour éviter une Troisième Guerre mondiale.
Augmenter la part de la richesse nationale consacrée à la défense et à la sécurité ?
À l’inverse de ce qui se passe en Europe, et malgré la crise, les dépenses militaires dans le monde continuent d’augmenter (- 2,8 % en Europe mais 3,8 % en Chine, par exemple). Cela dit, il n’est pas raisonnable d’envisager une augmentation du budget de la Défense compte tenu de l’état des finances publiques ; en revanche il ne doit pas être une variable d’ajustement. L’important est que la France demeure une puissance militaire complète et soit capable d’intervenir comme elle l’a fait récemment en Libye. Le niveau de 2 % du PIB environ que le président Sarkozy a pris l’engagement de conserver en trajectoire est raisonnable et fait de la France l’un des seuls pays qui ne diminue pas son budget en matière de défense. En tant que ministre de la Recherche, j’accorde par ailleurs beaucoup d’attention à développer notre potentiel scientifique et d’ingénierie, qui repose pour partie sur la recherche duale. Mais je pense que notre priorité, aujourd’hui, doit être de poursuivre l’élan qui a été engagé pour mettre en œuvre l’Europe de la défense, à laquelle je suis très attaché.
Engager le peuple français derrière ses armées et entretenir l’esprit de défense ?
L’armée est au cœur de l’identité nationale, et ce n’est pas seulement le politique mais l’historien que je suis qui l’affirme ! Rappelons que pour Machiavel, le premier devoir du Prince est la défense. Il n’y a pas d’État ou de Nation qui ne s’appuie sur une armée. L’armée a été l’un des outils avec lequel s’est forgée la nation française, de Bouvines à Strasbourg en passant par Valmy ! Un peuple et son armée ne font qu’un, il n’existe pas d’armée en soi. L’armée, comme l’école, a un rôle éminent dans la construction de la Nation, elles sont le creuset de la République et constituent des repères essentiels pour les Français, notamment des classes moyennes. L’école a évidemment un rôle à jouer pour rappeler à nos enfants les profondeurs historiques de notre politique de défense. Un effort est aussi à réaliser auprès des relais d’opinions, notamment les journalistes afin que la communauté médiatique soit, elle aussi, mieux informée des enjeux. C’est notamment le rôle de l’Institut des hautes études de défense nationale dont je salue l’action.
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