Dans un large tour d’horizon, l’auteur, expert des dossiers Défense, expose les conceptions d’un observateur engagé et trace les lignes d’effort de la prochaine législature au premier rang desquelles figurent la question de la capacité militaire européenne et la stabilité de l’outil nucléaire français.
Entretien « Défense » (2)
Defence interview No.2
In his broad overview the author, who is an expert on defence matters, offers some perceptions from the point of view of an informed observer, and outlines some of the directions that should be followed during the next governmental term, among the most important of which are the issues of European military capability and the stability of the French nuclear deterrent.
Depuis la fin de la guerre froide, la France n’est plus confrontée à une menace majeure mettant globalement en jeu la protection de sa population et de son territoire. Cependant, il lui faut affronter des dangers qui, pour être pernicieux comme le terrorisme, indirects comme certains désordres violents qui surviennent à l’intérieur ou à la périphérie du Vieux continent (Balkans, Méditerranée orientale, Caucase, Proche-Orient…) ou épars mais ciblés, comme les prises d’otages et la piraterie, sont des défis récurrents pour la stabilité de son environnement et pour la sécurité de ses ressortissants ou de ses intérêts. Face aux enjeux stratégiques de cette première moitié du XXIe siècle, notamment face à la prolifération nucléaire et à l’émergence de nouvelles grandes puissances militaires, notre pays doit aussi se préoccuper de consolider la défense collective des Européens.
Quand faut-il engager sans réserve les capacités militaires de la France ?
Juridiquement, en cas de légitime défense face à une agression ; concrètement, dans toute autre hypothèse, le recours à la force est affaire de circonstances et d’appréciation. Cependant, parmi toutes les situations où, faute de solution alternative, l’emploi de la force doit être envisagé, la sauvegarde de nos ressortissants apparaît le cas le plus spontanément justifié.
Limites humaines, techniques et matérielles des forces armées françaises ?
Depuis la guerre du Golfe en 1991, nous savons qu’un conflit lointain et intense n’est plus à la mesure d’un seul pays européen, fut-il la France ou le Royaume-Uni. Avec la campagne de Libye en 2011, vingt ans plus tard, les Français réalisent que leur pays, son allié britannique et collectivement les Européens ont été confrontés à des butées capacitaires pour mener à bien une opération militaire somme toute limitée et à proximité de leurs frontières. Pour corriger cette situation, la révolution dans la définition des appareils militaires ne peut pas s’effectuer dans un seul pays, elle doit concerner l’Europe tout entière. Le fait que cette réponse au plan politique soit toujours aussi peu évidente, en dépit des déclarations d’intention et même des traités européens, n’invalide pas la pertinence des solutions collectives possibles. La crise économique qui affecte les budgets militaires partout au sein de l’Union européenne les rend même plus impératives. La France, si elle veut à nouveau jouer en faveur de la défense européenne, objectif que le président Sarkozy a négligé voire méprisé tout au long de son quinquennat, doit avoir conscience :
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