Editorial
Éditorial
Les accidents stratégiques qui ont scandé l’année 2011 lui conférant ce statut d’année charnière, dix ans après le 11 septembre 2001, vingt ans après la fin de l’URSS en 1991 continuent de peser sur le climat de sécurité et de défense en ce début d’année. Crise économique qui affecte notre marge de manœuvre budgétaire et bouscule la construction européenne, crise nucléaire qui brouille l’équation technico-énergétique et relance la peur de l’atome militaire, crise arabe qui met en évidence la difficile modernisation du triangle qui régule le politique, le religieux et le social en Afrique du Nord.
Nos forces très sollicitées dans les combats multiples des crises de 2011 continuent d’être engagées dans des conditions difficiles en Afghanistan d’où elles seront désengagées progressivement dans les prochains semestres et dans un schéma incertain. Nos structures militaires continuent de s’adapter aux nouveaux formats et aux nouvelles organisations qui requièrent de tous rigueur, créativité administrative et dialogue social. Nos programmes d’armement se développent avec de nouveaux outils dont les performances vont changer la donne sur le terrain.
C’est dans ce contexte effervescent que la France se prépare au rendez-vous politique de la présidentielle. On pourra regretter la modicité des prises de position des acteurs de la scène politique sur les projets et les ambitions de sécurité nationale des prétendants à la fonction suprême, le consensus supposé sur l’essentiel justifiant l’atonie observée. Les déclarations de campagne des uns et des autres en matière de défense ne seront disponibles qu’en avril.
Alors dans ce temps d’attente qui n’est pas celui de la réserve, c’est sans doute le moment de parler de polarité et de transversalité stratégiques, deux axes le long desquels se rangent nos enjeux de sécurité et de défense en ce début de siècle chahuté.
Polarité d’abord, pour rappeler l’importance cruciale pour les militaires de la défense du territoire et de la sécurité de la population ; l’importance cardinale de la construction européenne, choix stratégique majeur du pays, y compris pour sa sécurité et sa défense ; l’importance ravivée de notre voisinage stratégique, au Sud dans le Maghreb et le Sahel, à l’Est dans l’Eurasie et le Caucase. Notre défense, celle de nos concitoyens s’analyse à travers notre voisinage, aujourd’hui comme hier. Là est notre attention, là sont nos partenaires. Le pôle stratégique de l’Atlantique à l’Oural et du Cap Nord au Sahel reste à construire.
Transversalité stratégique aussi, car nos intérêts et nos vulnérabilités ne sont pas que polaires, tant s’en faut. Notre prospérité résulte de la grande transversalité des flux économiques qu’a développés la mondialisation ; c’est elle qui impose ses rythmes et ses conditions à notre modèle industriel, commercial et social. Nos fragilités aussi relèvent de cette diagonale, dans ces nouveaux champs transversaux d’affrontement et de prédation monétaires, financiers, cybernétiques, spatiaux, maritimes et criminels non administrés par une autorité mondiale régulatrice ou gérés par des rapports de force stabilisés. Et là, c’est avec les puissances émergentes qui nous ressemblent ou qui partagent nos visions que nous devrons nous coaliser. ♦