En revenant sur la chronologie de l’année 2011 au Maghreb, l’auteur porte un diagnostic précis sur les évolutions sociopolitiques en cours, évalue les risques sécuritaires et plaide pour une nouvelle intégration maghrébine soutenue par une vraie réforme de la coopération avec l’Europe.
« Printemps arabe » : le Maghreb face au défi sécuritaire
Arab Spring: the Maghreb faces a security challenge
Looking back on events of 2011 in the Maghreb, the author analyses the current socio-political changes, evaluates the security risks and pleads for new Maghreb integration supported by real reform in cooperation with Europe.
L’année 2011 a connu un véritable bouleversement dans le monde arabe. Le mouvement révolutionnaire a débuté en Tunisie. Il s’est étendu par la suite à la quasi-totalité du monde arabe, soit sous forme de révolution, soit par l’évolution plus démocratique des régimes en place. Le Maghreb a été également touché par cette vague qui constitue l’événement politique le plus important depuis les indépendances.
Retour sur le « Printemps arabe » au Maghreb
Tout a commencé en Tunisie le 17 décembre 2010 par la tentative de suicide du jeune Mohamed Bouazizi, qui est décédé suite à ses blessures le 4 janvier 2011. En Tunisie, Ben Ali s’était accaparé tous les pouvoirs politiques, grâce à un régime policier qui écartait et emprisonnait tous ses adversaires. Sur le plan économique, sa famille et surtout son épouse se sont emparées de la fortune du pays, obligeant tout investisseur national ou étranger à verser son obole à la famille. Ben Ali a tenté de faire des concessions pour rester au pouvoir mais devant la détermination des manifestants dans la rue, et après avoir été lâché par l’armée, il s’est enfui en Arabie saoudite le 14 janvier. Après plusieurs changements de gouvernement, une Assemblée constituante a été élue le 23 octobre qui est dominée par le parti islamiste Ennahda qui a remporté 90 sièges sur 117. Le 12 décembre, Moncef Marzouki, un opposant au régime de Ben Ali et fondateur du parti du Congrès pour la République (CPR) est élu président de la République. Le 14 décembre, il nomme Hamadi Jebali, Secrétaire général du parti Ennahda au poste de Premier ministre.
Le « Printemps arabe » s’est déplacé par la suite en Algérie où les premières manifestations ont eu lieu le 5 janvier 2011 à Alger et dans vingt wilayas du pays. À cette date, l’Algérie est gouvernée par le président Abdelaziz Bouteflika qui exerce son troisième mandat, s’appuyant sur une coalition de trois partis : le Front de libération national (FLN), le Rassemblement national démocratique (RND) et le Mouvement de la société pour la paix (MSP) au référentiel islamique. Répondant à ces manifestations, un Conseil des ministres exceptionnel, réuni le 3 février, lève l’état d’urgence appliqué depuis 1992 et promet des réformes politiques. Le 5 mars, de nouvelles manifestations éclatent, comprenant des étudiants, des fonctionnaires et des représentants de la société civile. Le 21 mars, le pouvoir algérien entame des consultations pour la révision de la Constitution et organise des États généraux de la société civile afin d’instaurer une démocratie participative. Parallèlement, le gouvernement procède à des hausses de salaires des fonctionnaires qui atteignent 80 % pour certaines catégories, subventionne les produits de première nécessité et fournit des aides financières à la création d’entreprises. D’autres mesures sont prises pour favoriser la création d’emplois, la mise à niveau des PME/PMI et pour lutter contre la corruption. Contrairement à la Tunisie, l’Algérie n’a pas connu à ce jour un changement de régime politique pour deux raisons principales. La première est le souvenir de la terrible guerre civile de 1991-2001 qui a fait plus de 200 000 victimes, la seconde est la manne pétrolière qui a permis l’augmentation des salaires, la subvention des produits alimentaires et les aides fournies pour la création d’entreprises et d’emplois.
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