Revue des revues
• « L’avenir de la posture de dissuasion de l’Otan, une perspective américaine » ; The Atlantic Community Quarterly, été 1988. Dans ce numéro de l’organe du Conseil atlantique des États-Unis, R. James Woolsey, ancien sous-secrétaire à la Marine, se place d’emblée dans les partisans de l’armement nucléaire en citant un Français : « Mille ans d’histoire européenne nous ont appris une chose : la dissuasion conventionnelle ne marche pas ». Il décrit la genèse du traité INF (Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire) à partir du refus de l’ancien président Carter de mettre en place la bombe à neutrons en Europe.
Le mouvement antinucléaire des Européens a été ressenti aux États-Unis comme une réaction d’hypernervosité de gens s’exagérant un danger pour hésiter ensuite à recevoir l’aide demandée. Il en est résulté la proposition « d’option zéro » de 1981 visant le renoncement au déploiement de missiles américains Pershing II et GLCM (Ground Launched Cruise Missile) en Europe contre le démantèlement des missiles SS-20, SS-4 et SS-5, « la promenade dans les bois » (l’arrêt des négociations et le déploiement des missiles américains), le triomphe en 1982 aux élections américaines des partisans du gel des armements nucléaires, la lettre pastorale des évêques américains, les discussions sur le missile MX (missile expérimental Peacekeeper), la commission Scowcroft (dite également commission Tower, chargée d’étudier le rôle du personnel du Conseil de sécurité nationale américain dans la vente d’arme à l’Iran) , le discours du 23 mars 1983 par le président Reagan et la volonté de déploiement d’un bouclier anti-missile et, malgré la résistance de certains milieux, la rencontre de Reykjavik les 11 et 12 octobre 1986 jetant les bases du traité INF (Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, FNI).
Pour R. James Woolsey, on pourrait réduire radicalement le nombre des armes nucléaires stratégiques, voire les faire disparaître, si leur seul but était la dissuasion d’une attaque soviétique sur les États-Unis, mais il y a le problème européen. On ne doit pas exagérer le mouvement isolationniste américain, « l’été indien » de Gorbatchev peut être suivi d’un « hiver russe ». Il faut utiliser le temps gagné sans détruire le parapluie nucléaire de l’Alliance. En lui-même, le traité INF n’est pas un désastre, mais il donne l’illusion que, dans un avenir proche, l’Otan pourrait se passer d’une dissuasion nucléaire. Aux États-Unis, il existe un double mouvement antinucléaire, à gauche et à droite, alors qu’il faut poursuivre l’intégration de la République fédérale d’Allemagne (RFA) dans le tissu politique occidental, ce pays craignant que les armes nucléaires restant en Europe éclatent sur son territoire. On risque ainsi un mouvement allemand contre les armes à très courte portée, dont la disparition augmenterait l’avantage des Soviétiques dans le domaine des forces conventionnelles. Tout accord passé avec ceux-ci doit obtenir une réduction massive de leurs forces blindées en Allemagne de l’Est, qui doit devenir une priorité remplaçant en URSS la volonté de dénucléarisation du continent européen. Un repli de ces forces blindées à l’est de l’Oural n’est pas parfait, mais il donne à l’Otan un préavis supplémentaire.
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