Afrique - Afrique australe : des avances à pas comptés - Le Tchad renoue avec la Libye mais le bras de fer continue
Fin octobre 1988, les diplomates américains n’étaient pas parvenus à dénouer l’écheveau d’incompréhensions, de malentendus, de soupçons enveloppés de mauvaise foi, qui caractérise la situation en Afrique australe. Ils devaient tenir compte, tout en cherchant à démêler les fils, de l’état des conversations américano-soviétiques qui conditionnent, qu’on le veuille ou non, l’ampleur des compromis que chaque camp est susceptible de consentir. Il leur fallait aussi prendre en compte les limites que des considérations de politique intérieure imposent aux concessions que chaque État participant est capable de faire. Et dans ce domaine, ils ne pouvaient se fier qu’aux déclarations plus ou moins calculées des pouvoirs en place. La trêve permettait d’approfondir ce dialogue, mais n’assurait pas la paix. Elle n’ouvrait même pas une telle perspective car le principal problème de l’Afrique australe, celui de l’apartheid, ne figure pas au programme des discussions et n’est posé qu’en filigrane. C’est pourtant lui qui provoque les réticences, chaque adversaire, à propos de l’indépendance de la Namibie, sujet traité, cherchant, selon son camp, soit à temporiser l’évolution de ce régime, soit à en accélérer la chute.
Pour comprendre la situation présente de l’Afrique australe, pour déterminer si les négociations actuelles ont des chances de déboucher sur une paix durable, il faut par conséquent étudier en même temps que le déroulement des conversations sur la Namibie, l’évolution de la situation interne de l’Afrique du Sud, puisque les négociateurs y chercheront la preuve de la pureté des intentions du président sud-africain M. Botha. D’un autre côté, et dans la même perspective, la politique intérieure de l’Angola ne saurait rester dans l’ombre, puisque c’est en l’observant que les États-Unis et l’Afrique du Sud espèrent trouver la sincérité de l’aspiration du président angolais Dos Santos à une neutralité plus favorable aux normes occidentales. Fin octobre 1988, donc, la trêve était observée, mais personne ne pouvait prétendre que l’on parviendrait à une paix définitive sans que l’ANC (African National Congress, parti de M. Nelson Mandela, interdit en Afrique du Sud), opposition violente au régime de l’apartheid, et l’UNITA (Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola soutenue par les États-Unis et l’Afrique du Sud), opposition armée au gouvernement angolais formé par le seul MPLA (Mouvement populaire de libération de l’Angola soutenu par le bloc de l’Est et Cuba), aient été associés aux négociations.
Il n’apparaît pas d’ailleurs que les négociateurs aient la prétention d’assurer, en Afrique australe, une coopération, pas même une cohabitation harmonieuse entre les États. Washington qui, depuis deux années, n’a pas ménagé ses efforts pour établir et maintenir un dialogue angolo-sud-africain, ne vise pour sa part qu’un double objectif : faire respecter la loi internationale qui veut qu’un pays sous mandat de la Société des Nations (SDN), après que ce mandat ait été abrogé par l’ONU, devienne un État indépendant ; libérer l’Angola de l’emprise des forces socialo-cubaines en leur enlevant l’argument le plus convaincant par lequel est justifiée leur présence. Les autres participants, c’est-à-dire Pretoria et Luanda, plus ou moins contraints à négocier par un jeu capricieux des grandes puissances, ne le font pas sans arrière-pensées, qui sont confiantes chez M. Botha, un peu plus teintées d’angoisse chez M. Dos Santos. Mais les protagonistes ne sont pas les seuls en cause.
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