Aéronautique - La modernisation des avions de combat
Le coût élevé des chasseurs de nouvelle génération oblige de nombreux pays à n’envisager qu’à très long terme le remplacement de leurs flottes de combat. Celles-ci resteront donc en service jusqu’à la fin des années 1990 voire le début des années 2000. Elles devront cependant continuer de satisfaire aux exigences opérationnelles, ce qui implique une modernisation des appareils dans la mesure où toutefois une inspection préalable de la structure aura confirmé que la cellule peut encore effectuer plusieurs milliers d’heures de vol.
La modernisation des avions de combat intéresse principalement deux domaines : les moteurs et les équipements électroniques.
La remotorisation
Un des programmes actuels de remotorisation concerne les chasseurs bombardiers A-4 Skyhawk de la République de Singapour. Ces appareils seront équipés de réacteurs double flux General Electric F-404 en remplacement des Curtiss Wright J-65 d’origine. Plus léger de 450 kg, délivrant 900 kg de poussée supplémentaire par rapport à son prédécesseur, le F-404 conférera à l’A4 de meilleures performances au décollage et plus de manœuvrabilité en vol.
D’autres projets peuvent être cités :
• Le Super Phantom 2000, Phantom doté de nouveaux moteurs Pratt & Whitney PW1120, dont la masse est inférieure de 20 % à celle des General Electric J 79 installés sur la version de base, et qui fournissent une poussée supérieure de 15 %. La capacité d’emport de l’appareil sera augmentée, ainsi que sa vitesse de pénétration et son rayon d’action. La concrétisation du projet pourrait constituer une suite logique à l’abandon l’année dernière du programme national du nouvel avion de combat Lavi.
• Le Vought A-7 Plus, version remotorisée des avions d’assaut A-7D et A-7K. Cet appareil pourrait être équipé d’un réacteur de puissance accrue lui permettant ainsi de recouvrer des performances compatibles avec les missions BAI (Battlefield Air Interdiction) visant à interdire l’acheminement des renforts ennemis dans la zone des combats.
En matière de remotorisation il convient enfin de rappeler le programme réalisé au profit des avions ravitailleurs KC-135 de l’US Air Force et C-135 de l’Armée de l’air. Les turboréacteurs originaux simple flux de ces appareils ont été remplacés par des réacteurs double flux CFM56. Cette opération s’est d’ailleurs accompagnée d’un changement du train d’atterrissage, des génératrices, des freins, de la centrale aérodynamique ainsi que de diverses autres modifications mineures. Le gain obtenu a été particulièrement important : masse maximale au décollage augmentée de 7 %, consommation inférieure de 25 %, quantité de carburant transférable à distance équivalente plus élevée de 20 %.
Des divers projets et réalisations en cours, il ressort que la remotorisation permet des gains importants aux plans de la puissance, de la fiabilité, de la consommation, des performances et des coûts d’utilisation. Toutefois, l’opération est onéreuse. Elle exige en effet, outre l’acquisition de nouveaux moteurs et des pièces de rechange correspondantes, des études et des essais en vol. Elle ne peut donc être justifiée que dans la mesure où le moteur existant ne donne plus satisfaction (puissance insuffisante au regard des performances exigées, signature infrarouge importante, manque de fiabilité…). De plus, l’avionnage de nouveaux moteurs sur une cellule peut poser des problèmes lorsqu’ils sont logés dans le fuselage. Il est donc préférable de faire évoluer l’appareil avec des versions améliorées du moteur d’origine, à l’instar des Mirage (gamme Atar) ou des Tornado (gamme Rolls Royce RB199).
La modernisation électronique
La revalorisation des équipements électroniques constitue le second volet de la modernisation des flottes de combat. Elle est rendue nécessaire par l’évolution de la menace et porte principalement sur les systèmes de navigation, d’attaque et de visualisation, les radars, ainsi que sur divers moyens de guerre électronique (détecteurs d’alerte, éjecteurs de leurres…). Ainsi, dans un souci de fiabilité et de facilité de maintenance, l’armée de l’air américaine a décidé d’installer sur tous les avions de sa flotte des centrales à gyrolasers à la place des anciens équipements électromécaniques de navigation par inertie.
Bien souvent, il s’agit de remplacer l’avionique analogique d’ancienne génération par des équipements de type numérique, ce qui implique un recâblage de l’appareil. C’est pourquoi, lorsque la modernisation est importante, une intégration soignée des systèmes est à rechercher, plus particulièrement quand il s’avère nécessaire de changer de radar. Il convient enfin de noter qu’en règle générale, toute rénovation des systèmes de navigation et de visée s’accompagne d’un réaménagement du poste de pilotage.
Deux programmes de modernisation d’avionique méritent d’être mentionnés :
• Tout d’abord, la flotte américaine de F-111, tactique et stratégique, soit quelque 400 appareils en cinq versions, pour lesquels une revalorisation de l’installation électronique est en cours, afin d’améliorer la fiabilité des systèmes et d’en faciliter l’entretien : nouveaux calculateurs, URP (Unités remplaçables en piste) de dernière génération, centrales inertielles à gyrolasers contre-mesures électroniques nouvelles… Le premier avion ayant bénéficié de l’Avionics Modernisation Program a été livré aux forces en août 1985.
• Un autre programme de rénovation électronique est celui des Skyhawk néo-zélandais, qui s’achèvera en octobre 1989 et comporte entre autres : l’installation d’un radar APG 66 NZ, variante de celui équipant les F-16 A/B de General Dynamics, d’un collimateur de pilotage et d’une centrale de navigation inertielle à gyrolasers. Ainsi rénovés, les Skyhawk devraient répondre aux préoccupations majeures de l’armée de l’air néo-zélandaise, en matière d’appui aérien rapproché et d’assaut maritime.
La modernisation de certains avions français
S’agissant plus particulièrement des matériels français, 1 400 Mirage III et V ont été commandés par une vingtaine de pays. Compte tenu du vieillissement des cellules, il est possible d’envisager le maintien en service de nombreux appareils jusqu’en l’an 2000, le potentiel de vol pouvant être porté de 3 000 à 5 000 heures.
Actuellement des rénovations de Mirage III sont en cours de négociations. Bien qu’il s’agisse avant tout de revaloriser le système d’armes, l’opération permettra éventuellement une remise en état de la cellule voire le remplacement des réacteurs d’origine par des versions plus évoluées (Atar 9 K50).
À noter que certains pays ont déjà procédé indirectement à la modernisation de ce type d’appareil en le transformant sur place. Ainsi le Kfir israélien dérivé du Mirage V ou le Cheetah, version développée par l’Afrique du Sud à partir du Mirage III.
Conclusion
Le marché de modernisation des avions de combat paraît donc très prometteur. Il intéresse avant tout les forces aériennes de pays dont la situation financière est moins bonne que par le passé. Plus généralement, le rééquipement des aéronefs militaires permet de repousser l’échéance du remplacement des flottes et d’attendre l’arrivée d’avions de nouvelle génération (Avion de combat tactique ou ACT [NDLR : futur Rafale], European Fighter Aircraft ou EFA [NDLR : futur Eurofighter Typhoon]…), tout en maintenant une capacité opérationnelle compatible avec la menace. Les avions les plus modernes n’échappant d’ailleurs pas à de telles opérations : ainsi une partie des F-16 A/B, pour lesquels un processus de revalorisation a été défini dès 1984. L’Operational Capabilities Upgrade doit permettre de maintenir à niveau opérationnel les appareils des forces aériennes américaines, belges, danoises, néerlandaises et norvégiennes, en les rendant notamment aptes au tir du nouveau missile air-air ASRAAM (Advanced Short Range Air-Air Missile).♦