Mer contre Terre. La victoire vint de la mer
Parmi les marins qui ont pris la plume en ces dernières années pour traiter des problèmes concernant la guerre, et leur activité de combattants sur mer, le capitaine de vaisseau Lepotier est un de ceux qui ont, dès à présent, accompli l’œuvre la plus marquante.
Peu de temps avant la guerre même, en 1938, il avait rédigé un ouvrage considérable, fruit de plusieurs années de recherches et de traductions d’archives. Il est, sous le titre Mer contre terre, consacré aux leçons que l’on peut tirer de l’histoire de la lutte, farouche et sanglante, à laquelle, de 1861 à 1865, se livrèrent les Américains du Nord et du Sud. C’est une œuvre qui ne compte pas moins de 357 pages, très denses, dans lesquelles l’auteur a cherché à faire la synthèse de toutes les œuvres parues jusqu’ici sur le grand drame de la guerre civile américaine ; mais il l’a surtout étudiée en marin et a cherché à y dégager le rôle essentiel joué par les forces navales pour l’obtention de la décision. Sous une forme moderne, il a mis en lumière cette pensée du Prince de Joinville qui écrivait déjà : « Ce qui nous occupent, c’est le rôle de la marine, joué dans la lutte, c’est l’enchaînement des Sociétés qui se sont manifestées et qui lui ont donné ce rôle, c’est la manière dont elle a réussi dans sa tâche. »
Disciple de Mahan et de notre éminent collaborateur l’amiral Castex, le capitaine de vaisseau Lepotier est d’avis qu’il faut étudier l’histoire du passé, y rechercher des « idées » et non des « recettes », et que, si tout ce qui concerne le combat évolue selon les caractéristiques et les perfectionnements des armes, leur mise en œuvre n’est cependant pas tout l’art de la guerre. En tout cas, l’auteur qui avait, à propos de la guerre de Sécession, montré le succès d’une coalition maritime contre un perturbateur continental, a eu, au cours même de la lutte qui vient de se terminer, la satisfaction de voir confirmée cette théorie fondamentale. Son petit livre La Victoire vint de la mer, n’est pas, il le reconnaît, une histoire complète de la guerre ; elle ne pourra, à son avis, être écrite que dans plusieurs années, c’est un essai de présentation des principaux événements aéronavals. Malgré la différence des engins employés, l’auteur s’est particulièrement attaché à montrer, sur les divers théâtres d’opérations, aussi bien méditerranéens que pacifiques, l’importance de la puissance aéromaritime. Une étude plus approfondie permettrait des rapprochements bien suggestifs entre les forces utilisées, il y a 80 ans, dans les débarquements, dans l’attaque des organisations terrestres des Sudistes, et dans les opérations amphibies gigantesques menées par les descendants des marins américains du Nord, au cours de la campagne du Pacifique. De toute façon, cette œuvre, si modeste soit-elle, de l’avis de son auteur, est un complément fort intéressant à sa grande œuvre de 1938 : Mer contre Terre. Il est animé du même esprit et des mêmes convictions.