Armée de terre - L'instruction de la classe 1946 - Le discours du ministre des Armées à Alençon
Nous avons déjà signalé dans une de nos précédentes chroniques l’importance des directives données par le général Chef d’État-major général de l’Armée de terre, le général de Lattre de Tassigny, concernant l’instruction de la classe appelée. « Notre rénovation militaire dans son esprit, ses méthodes, ses disciplines, trouvera un test dans l’instruction de la classe 1946. La réussite de cette instruction revêt donc une importance capitale. D’elle dépendront non seulement la valeur de nos unités, mais aussi l’opinion de la Nation à l’égard de son armée. » Le problème ainsi posé, les directives s’appliquent particulièrement à la première phase de l’instruction, phase de formation à l’issue de laquelle « le jeune soldat doit être moralement, physiquement et techniquement apte à faire campagne ».
Pour assurer cette éducation et cette mise en condition de l’homme, l’Inspecteur général de l’armée précise que l’entraînement des recrues doit être poursuivi au grand air dans un cadre qui permette à la fois l’épanouissement physique et moral de l’individu et la création spirituelle et matérielle de petites unités où naisse l’esprit d’équipe et de discipline collective. Ainsi c’est vers la solution des « camps légers », rassemblant les effectifs d’un bataillon, réunissant dans une même ambiance les cadres et les recrues, que l’armée s’est orientée. On conçoit la part prépondérante, dans un tel programme, de l’éducation physique – gymnastique et entraînement individuel d’une part, sports de synthèse d’autre part. Quant à l’instruction militaire proprement dite, elle consiste principalement à donner aux hommes les connaissances présentant un caractère de nécessité constante, que le combattant soit lancé du ciel, fasse partie de l’équipage d’un engin blindé, ou parte en patrouille avec un détachement de fantassins. Utilisation de l’armement léger, tir, observation et étude du terrain, conduite des véhicules, usage des moyens de transmissions, sont des matières où les notions assimilées ne seront pas perdues pour ceux qui les ont apprises, quels que soient lors des prochaines années les bouleversements techniques qui interviendront dans le domaine des matériels. À cela il faut ajouter l’instruction du combat rapproché, – indispensable non seulement aux jeunes gens qui sont destinés aux unités de choc, ou aux futurs combattants aéroportés et aérotransportés, mais encore à la masse des hommes qui, dans la guerre future, auront à se défendre contre des assaillants inattendus tombés du ciel ou surgis sur les flancs ou les arrières. Enfin, la fatigue physique qu’une telle formation imposera pendant les quelques mois de cette première phase doit être compensée par une organisation rationnelle des heures de détente, partagées entre jeux, chants, travail d’ateliers, amélioration de l’habitat et construction d’installations sportives.
La réalisation intégrale de ce programme n’a pu être évidemment l’œuvre de quelques semaines et les difficultés matérielles rencontrées ainsi que le coût des aménagements à édifier sont de sérieux obstacles. Dans certaines régions favorisées par l’existence d’installations facilement utilisables, les résultats escomptés ont été presque immédiatement obtenus. Ailleurs les unités du génie et les formations composées des jeunes appelés ont rivalisé d’ardeur pour hâter l’édification des camps. Non loin de Paris, à proximité de Saint-Cyr ravagé par la guerre, le plateau de Frileuse s’est couvert de coquettes maisons de bois, de tentes, de terrains de sport, qui sont le domaine d’un bataillon d’infanterie. Chaque section dispose d’une bâtisse propre et agréable abritant les chambres des cadres, le réfectoire, les douches ; alentour les groupes de la section sont installés chacun sous une grande guitoune. Les chalets de la compagnie sont utilisés pour les bureaux, le foyer particulier de l’Unité, les logements des officiers et le mess des sous-officiers. Chaque section dispose de terrains de basket, chaque compagnie d’un parcours de cross bien conçu. Enfin, les bureaux de l’état-major, les cuisines, le grand foyer du bataillon sont également groupés dans des installations légères, modernes et confortables : un grand parcours d’obstacles et des terrains de sport collectif complètent à l’échelon du bataillon les moyens plus réduits des compagnies et des sections.
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