Diplomatique - Le statut de l'Allemagne : des recommandations de Londres aux résolutions de Varsovie - Jeux dangereux autour de Berlin - Belgrade et Moscou - L'affaire de Palestine
Il était peut-être temps, au mois de juin 1948, d’élaborer et de soumettre à l’examen des gouvernements intéressés quelques propositions concrètes touchant le statut de l’Allemagne. Le peuple allemand lui-même pouvait se plaindre d’être depuis trop longtemps victime du désaccord et de l’indécision de ses vainqueurs. Pour une part de ceux-ci, l’attitude invariablement négative de l’Union soviétique constituait, il est vrai, une excuse valable : mais cette excuse n’atténuait en rien les difficultés d’une situation qui, en se prolongeant, ne faisait que s’aggraver. C’est pourquoi le communiqué annonçant que les délégués des six puissances, réunis à Londres depuis le 20 avril 1948, s’étaient enfin mis d’accord sur quelques points essentiels, fut généralement accueilli dans le monde avec satisfaction.
Au contraire, dans notre pays, les « Accords de Londres » – comme on les a appelés très improprement – devaient soulever un mécontentement presque violent. La vérité est que, depuis la fin d’avril, le Parlement et la presse avaient tout à fait perdu de vue les négociations poursuivies de l’autre côté du Canal, et qu’on les mettait brusquement en face de résultats qui répondaient très imparfaitement à leur attente. En tenant l’opinion, ou tout au moins l’Assemblée, au courant des pourparlers de Londres, de leurs difficultés et de leur progrès, le gouvernement français non seulement aurait évité cet effet de surprise, mais il aurait permis à ses négociateurs d’invoquer, dans certains cas, la « résistance invincible » de leur opinion publique, argument dont les Britanniques ont souvent joué avec succès.
Beaucoup de Français n’auront connu le document de Londres que par les critiques dont il a été l’objet au Parlement et dans la presse. Ils auront appris que le contrôle, dans la Ruhr, s’exercera non sur la production, comme nous l’avions demandé, mais sur la répartition : que l’Assemblée constituante qui doit ouvrir la voie au futur gouvernement de l’Allemagne occidentale sera élue suivant un système choisi par les États eux-mêmes et non suivant celui que nous avions proposé, etc., etc. Mais les mêmes Français ont fort bien pu ignorer que, sur ce dernier point, les efforts de nos délégués ont fait écarter une motion anglo-américaine qui réclamait l’élection au suffrage universel. Il a fallu batailler pour obtenir que la prise de pouvoir par le futur gouvernement ne fût pas fixée au 1er janvier 1949 : pour qu’en tout cas cette prise de pouvoir ne pût avoir lieu qu’après l’entrée en fonction de l’« autorité internationale » chargée du contrôle de la Ruhr.
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