Liquidation de nos finances de guerre
L’expression monétaire des finances de guerre masque et dénature la réalité économique. En apparence, les dépenses de guerre se font en monnaie dont l’abondance progressive répand une impression d’euphorie. Si l’on enlève le voile monétaire, on constate une pénurie croissante des biens et une déperdition sensible du matériel. En vérité, le financement de la guerre se ramène à une restriction de la consommation au profit des investissements faits pour des fins improductives.
En Angleterre, l’indice de la consommation privée est tombé de 100 en 1939 à 79 en 1944 ; en France, le ravitaillement n’a satisfait, ces dernières années, que la moitié à peine des besoins physiologiques évalués à 2.400 calories par jour. Le revenu réel devenu disponible, grâce à la restriction de la consommation, a été transféré à l’État par l’impôt et l’emprunt pour lui permettre de faire face à la production et à la consommation de guerre. Mais les dépenses de guerre exigent aussi une amputation du capital. L’Angleterre a liquidé le gros de son patrimoine étranger pour se procurer des matières, équipements et denrées nécessaires à la poursuite de l’effort de guerre. Le produit net de la vente des actifs à l’étranger a atteint 1.065 millions de livres au 30 juin 1944 : à la même date, l’accroissement de la dette extérieure est ressorti à 2.300 millions de livres (1) ; d’après les déclarations du Chancelier de l’Échiquier, l’endettement britannique à l’étranger a dépassé 4.000 millions de livres le 31 mars 1945.
Tous les pays belligérants ont attaqué leur capital économique intérieur pour élargir le potentiel des dépenses de guerre : le produit de la liquidation des stocks, les fonds normalement réservés à l’amortissement de l’outillage, ont été mis à la disposition du Trésor. Enfin, l’inflation monétaire et de crédit a fermé le circuit des finances de guerre : il s’agit d’une traite sur l’avenir qui sera payée par une amputation future du pouvoir d’achat de tous ceux qui ont des revenus fixes.
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