La question de la vulnérabilité et de l’élongation des approvisionnements énergétiques par voie maritime de la Chine, vitaux pour son développement, pose celle de bretelles terrestres de raccordement d’énergie à l’Asie centrale et de la constitution d’un réseau de bases militaires de protection et de soutien.
La Chine et le « dilemme de Malacca » : la tentation militariste
L’un des principes cardinaux de la Chine a toujours été de ne jamais déployer de bases militaires à l’étranger. Depuis l’avènement de la République populaire, les nombreuses déclarations de politique générale énonçant les stratégies chinoises ont en effet résolument réaffirmé que la Chine renoncerait à déployer des forces militaires hors de son territoire. C’est encore ce que précisait le Livre blanc sur la défense en 2010 : « La Chine ne recherche pas l’hégémonie ; elle ne s’engagera jamais dans la voie de l’expansion militaire, quel que soit le niveau de développement de son économie ». Il reste que cette posture vertueuse, qui vise à la démarquer du schéma américain et des quelques centaines de bases déployées par les États-Unis dans le monde, pose à la République populaire le grave problème de la sécurité de ses lignes de communication maritimes et singulièrement celles qui relient son industrie, de plus en plus gourmande en énergie, au pétrole du Moyen-Orient et d’Afrique.
En 2015, la Chine, qui n’est plus autosuffisante depuis 1993, devra importer les 2/3 de sa consommation de pétrole et les 4/5 en 2030. Aujourd’hui, elle importe chaque jour 725 000 tonnes de brut, dont 50 % viennent du Moyen-Orient. Le long cordon ombilical de l’économie chinoise vers le pays du Golfe constitue donc une vulnérabilité majeure et un casse-tête pour les stratèges chinois qui lui ont donné un nom : « Le dilemme de Malacca ». L’évocation par les Chinois de l’une des voies maritimes les plus étroites et les plus fréquentées de la planète, également la plus rapide depuis l’océan Indien vers la mer de Chine du Sud – et aussi l’une des plus faciles à condamner – renvoie à cette fragilité que Pékin tente de réduire.
Le moindre blocage de la route des pétroliers chinois, dont la sécurité serait, en cas de tensions graves, encore assurée par la Marine des États-Unis – une éventualité insolite et agaçante pour les responsables chinois – ferait dérailler la machine industrielle de la croissance, condition de la stabilité interne et principale légitimité du régime actuel.
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