Il y a tout juste 70 ans, Chuck Yeager franchissait avec son avion expérimental le mythique mur du son et dépassait ainsi Mach 1. Cet exploit reposait autant sur la technologie que sur le courage et l’audace du pilote. C’était l’époque où les héros étaient ceux qui allaient de l’avant au service de leur nation et pour qui aviation rimait avec passion.
14 octobre 1947, Chuck Yeager, le pilote plus rapide que le son (T 938)
Le capitaine Yeager devant le Bell X-1, sur le tarmac de Muroc Air Field (photo : NASA)
October 14, 1947, Chuck Yeager, the pilot faster than the speed of light (T 938)
Just 70 years ago, Chuck Yeager crossed the mythical sound barrier with his experimental aircraft and so surpassed Mach 1. This exploit was based as much on technology as on the courage and daring of the pilot. It was the time when the heroes were the ones who went ahead in the service of their nation and for whom aviation rhymed with passion.
Le héros de cet exploit s’appelle Charles E. Yeager. Mais ses amis l’appellent Chuck. Il naît en Virginie le 13 février 1923 dans une Amérique simple et laborieuse. En 1941, il s’engage dans l’US Army Air Corp et il devient pilote de chasse. Sur le fuselage de son P-51B Mustang, en mission dans le ciel de France, on peut lire Glamorous Glennis, « La Belle Glennis », sa fiancée. En mission d’escorte, il est abattu par un Focke-Wulf Fw-190 dans la région de Bordeaux. La résistance française le recueille et le fait passer en Espagne. À la fin du conflit, il a 12 victoires à son actif, dont un Me-262, l’avion à réaction de la Luftwaffe. Après-guerre, faisant preuve d’exceptionnelles qualités de pilotage, il rejoint l’équipe des essais en vol basée à Muroc Air Field en Californie. 70 ans après, jour pour jour, Chuck Yeager est le plus célèbre des pilotes d’essais.
Franchir le mur du son
Le haut désert de Californie sert de décor à cette épopée : une plaine aride, des routes bien droites et des cactus. Au milieu de tout cela, un terrain d’aviation surmonté de quelques hangars. Le soleil tape fort, le ciel est bleu pâle, il fait plus de 40°. Non loin de là, le hameau de Mojave, son Motel et une ligne de chemin de fer empruntée par d’interminables trains de marchandises. Ambiance Bagdad Café. Los Angeles est à 1 h 30. Chuck Yeager fait partie du corps des pilotes d’essais de l’US Air Force. Entre eux, respect et compétition, tous partageant une passion pour l’aviation. Chacun veut être le premier à conquérir le prochain sommet fixé par l’Air Force. C’est la guerre froide, la menace est soviétique, et l’Air Force veut conserver la maîtrise des airs, mais aussi celle des budgets dans les luttes qui l’opposent à sa rivale, la Navy. Pour les pilotes, le moindre souci de santé ou la plus petite défaillance, et la sanction tombe : être écarté de l’aristocratie des pilotes, au mieux être relégué dans l’aviation de transport, au pire que tout s’arrête dans le fracas d’une boule de feu. Ce métier est risqué, puisque le travail consiste à monter dans une machine dangereuse au pilotage pointu. Aux premières heures des jets, il leur faut explorer eux-mêmes des domaines jusque-là inconnus : les hautes vitesses, le mur de la chaleur, le vol en haute altitude dans une atmosphère raréfiée (les pilotes de montagne sur Jodel comprendront).
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