Le sanctuaire de Lourdes a accueilli durant ce week-end de Pentecôte le 60e Pèlerinage militaire international rassemblant plus de 14 000 militaires et civils venant d’une cinquantaine de pays et partageant de nombreuses valeurs en commun. Créé en 1958, le PMI a contribué au rapprochement d’armées qui quelques années auparavant se battaient entre elles.
PMI : 60 ans au service de la Paix, de la Fraternité et de la Réconciliation (T 1006)
IMP: 60 years at the service of Peace, Fraternity and Reconciliation
The Sanctuary of Lourdes hosted during this weekend of Pentecost the 60th International Military Pilgrimage, bringing together more than 14,000 soldiers and civilians from over fifty countries, sharing many values in common. Created in 1958, the IMP contributed to the rapprochement of armies that a few years ago were fighting each other.
Novembre 1918 : les trompettes sonnent le cessez-le-feu. Dimanche 20 mai 2018 au soir, la musique militaire allemande donne les hymnes nationaux, notre Marseillaise et le Deutschlandlied. Symbole de cette réconciliation qui, un siècle après la « der des ders » et l’abomination de la Seconde Guerre mondiale, a permis de reconstruire une Europe de la Paix malgré les épreuves qui dévastèrent le « vieux continent ».
En mai 1958, alors que les cicatrices sont encore vives, le Pèlerinage militaire international (PMI) était créé, institutionnalisant une démarche initiée dès décembre 1944 par des combattants des Forces françaises de l’intérieur (FFI) venus se recueillir au sanctuaire. En 1947, sous l’impulsion des autorités ecclésiastiques et militaires françaises, le Pèlerinage national était lancé. Mais quasiment dès le début, des anciens combattants allemands sont venus à Lourdes. Avec la création de la Bundeswehr, l’idée d’internationaliser le pèlerinage s’est imposée et en 1958, le 1er PMI avait lieu, avec la présence du Maréchal Juin qui prononçait un discours « pour la Réconciliation des Peuples du Monde ». Ce titre illustre parfaitement la démarche du PMI qui, soixante ans après, reste d’actualité et montre combien le PMI a contribué à ce long processus de reconstruction.
Pour ce 60e anniversaire, plus de 14 200 pèlerins ont répondu présents, venant de près de 50 pays. Ce dernier chiffre ne cesse de monter. En 2009, 31 pays étaient présents. Si la France représente 35 % des participants avec plus de 4 000 militaires et civils, c’est bien cette dimension internationale qui frappe et les cérémonies avec les drapeaux des délégations montrent bien ce formidable aspect. Ainsi, tous les pays des Balkans ont participé, alors même qu’il y a une vingtaine d’années, la guerre avait balayé l’ex-Yougoslavie et déchaîné des haines encore vivaces dans la région. Mais venir à Lourdes au PMI est bien une démonstration que la Paix est possible comme ce fut le cas il y a plus d’un demi-siècle avec la réconciliation franco-allemande.
Cependant, l’Europe n’est pas la seule présente au PMI et tous les continents y sont représentés y compris les plus lointains. L’Australie, l’Indonésie et les Philippines, mais aussi la Corée du Sud pour l’Asie. Si le continent africain est bien représenté, Madagascar et l’Afrique du Sud sont également là, malgré les distances. Et que dire du Chili et de l’Argentine à l’extrémité du continent sud-américain… C’est vraiment cette dimension multinationale qu’il faut retenir ici et qui contribue à accroître chaque année l’importance du PMI.
Bien sûr, les dimensions religieuse et spirituelle sont au cœur de la démarche des pèlerins, mais s’y rajoutent d’autres dimensions qui méritent d’être rappelées ici.
Tout d’abord, le PMI met au premier rang nos malades mais surtout nos blessés. Comment ne pas être ému lorsque l’on croise certains de nos jeunes soldats dont le corps meurtri conservera à jamais les séquelles d’une blessure au combat pour protéger nos libertés. Et malgré la lourdeur du handicap, ils sont présents, fiers de montrer qu’ils restent des soldats, dans leur uniforme, nous donnant à nous, valides, une leçon de vie et d’espoir. Ainsi, pour la cinquième année consécutive, le samedi après-midi est consacré au Challenge sportif blessés-valides. Près d’une quarantaine d’équipes y ont participé. Une dizaine de coureurs valides devait parcourir dans la prairie un circuit en traînant derrière eux un blessé ou un malade transporté dans une goélette.
Ce n’est pas un hasard si la secrétaire d’État Geneviève Darrieusecq a passé du temps à discuter avec ces jeunes dont la générosité est impressionnante. C’est aussi l’intensité des regards entre la directrice du Service de santé des Armées et nos blessés. Là, chacun comprenait tant la finalité du SSA que l’attente de celui qui souffre. Les élèves des lycées militaires de la Défense n’étaient pas en reste pour participer à ce temps fort du 60e PMI, chacun ressortant grandi de ces échanges. Il faut y rajouter les jeunes du Service militaire volontaire (SMV) mis en place après les terribles attentats de 2015 pour contribuer à la cohésion nationale.
Cette dimension de la jeunesse était d’ailleurs partagée par l’ensemble des délégations, ce qui en dit long sur la formidable énergie qui se dégage d’un tel rassemblement et des espoirs réels qu’il suscite. En effet, avec le mélange des
uniformes de toutes les Nations et de toutes les conditions sociales – du jeune en académie militaire aux officiers de haut rang –, les frontières sont abolies et les discussions fusent, permettant à chacun de découvrir l’autre et ainsi de s’enrichir mutuellement.
Le PMI, c’est aussi une organisation logistique complexe qui fait honneur à la France, avec un déploiement de moyens humains et matériels certes conséquents mais reposant en grande partie sur le bénévolat. Pour nos blessés et les malades, qu’ils soient Français ou appartenant aux délégations étrangères, l’Hospitalité Notre-Dame des Armées apporte un soutien essentiel, appuyé par le Service de santé des Armées. Mais ce sont aussi tous ceux qui assurent des tâches parfois ingrates pour que le PMI se déroule dans la sérénité. Ce sont les jeunes élèves gendarmes des écoles, ce sont les soldats de l’opération Sentinelle qui patrouillent pour dissuader le moindre incident et contribuant de fait à la sécurisation non seulement du PMI mais du sanctuaire au profit des milliers d’autres pèlerins civils qui sont présents sur le site.
Assurer cette sécurité n’est pas une mince affaire mais elle nous a rappelé le sacrifice, il y a quelques mois à l’autre bout de la chaîne des Pyrénées, du colonel Arnaud Beltrame à Trèbes face à un terroriste djihadiste. Ce n’est donc pas un hasard si plusieurs délégations étrangères ont tenu à saluer la mort du gendarme au service de ses concitoyens, démontrant ainsi que défendre la Paix et la liberté est au cœur de notre métier, quels que soient la couleur de l’uniforme et le drapeau de notre pays.
* * *
Ce 60e PMI s’est donc inscrit dans cette année du Centenaire de la fin de la Grande Guerre. En rassemblant autant de pays et de participants, le PMI contribue à cette culture de la Paix que portent nos armées face aux dangers du Monde. Avec une majorité de jeunes, il montre bien la voie à suivre du dialogue et du partage. Au cœur des montagnes pyrénéennes, il est l’occasion, pour chacun, de pouvoir prendre le temps et de réfléchir à sa vocation qu’il soit militaire en activité, réserviste, retraité, civil des Armées, d’une famille militaire et de comprendre que la Paix est certes fragile mais qu’elle nous unit tous. ♦