La situation politique et sécuritaire de la Libye reste très confuse malgré les médiations engagées depuis plusieurs années. L’actuel représentant spécial de l’ONU, Ghassan Salamé, doit composer avec des parties encore opposées à la recherche d’un consensus général. Une Conférence nationale, prélude à un processus électoral, pourrait se tenir cette année, à condition que la question très sensible de la redistribution des richesses issues des hydrocarbures soit tranchée. Le chemin est encore long même si des progrès existent.
Libye : la Conférence nationale, pierre angulaire d’un nouveau plan de Ghassan Salamé ? (T 1070)
Libya: the National Conference, cornerstone of the new Ghassab Salamé plan?
Libya's political and security situtation remains very chaotic despite the mediations intitated for years. The current UN special representative, Ghassan Salamé, must contend with parties who are still opposed to the search of a general consensus. A national conference, a prefule to the electoral process, could be held this year, provided that the very senstitive issue of the redistribution of wealth from hydrocarbons is settles. The road is still long, even if progress is made.
Depuis la chute du régime du colonel Kadhafi en 2011, le cheminement de la Libye aura été malaisé. La concentration du pouvoir au niveau local et dans les milices, hors du parapluie institutionnel, a laissé un vide qu’aucun acteur n’a été en mesure de combler. Le pays se trouve divisé en multiples territoires autonomes, quasi-indépendants, vivant au gré d’alliances et d’intérêts immédiats. Une dynamique vertueuse était envisageable en décembre 2015 avant l’entrée en vigueur d’un accord politique visant à la mise en place d’un gouvernement d’entente et d’un accord destiné à préparer l’organisation d’un référendum sur le projet de Constitution suivi par des élections législatives. Pourtant, la situation reste marquée d’abord par l’absence de consensus autour d’une perspective de reconstruction politique, par un clivage politique ensuite, par un différend institutionnel enfin. Après l’échec de l’approbation à la signature par la Chambre des représentants (HoR), grande est la menace d’approfondir la principale fracture politique entre les partisans et les adversaires de l’accord et d’ouvrir de nouvelles fragmentations au sein des deux camps.
Cependant, au moment où les puissances étrangères expriment leur inquiétude face à la situation, l’ingérence étrangère et la rivalité entre acteurs internationaux ayant des intérêts dans cet État riche en pétrole ne font que rajouter la crise à la crise. L’Égypte et les Émirats arabes unis ont soutenu le maréchal Haftar (chef d’état-major de l’armée libyenne), le considérant comme un rempart contre les groupes islamistes. À l’inverse, leurs rivaux dans les luttes de pouvoir régionales, la Turquie et le Qatar, ont soutenu des factions opposées à M. Haftar (cf. Patrick Wintour). La candidature étrangère pour façonner la Libye s’étend à la France et à l’Italie – des voisins européens qui se disputent le titre de sponsor principal d’un processus de réconciliation (cf. Tribune n° 1039). Ces deux pays ont organisé des réunions de médiation l’année dernière, mais les efforts européens n’ont pas été coordonnés, sous-tendus qu’ils l’étaient pour leurs propres intérêts.
Dans ces conditions, on peut légitimement s’interroger sur la manière dont la Libye va s’extirper de l’instabilité et du chaos dominants depuis la chute de Kadhafi. Est-il possible de trouver une solution politique pour sortir de cette crise après l’échec des tentatives successives de l’ONU pour parvenir à un consensus entre les factions en conflit ? Quelles perspectives s’offrent à la scène libyenne à la lumière des développements ? La Conférence nationale sera-t-elle la dernière chance pour le Libanais Ghassan Salamé (représentant de l’ONU pour la Libye depuis juin 2017) de rétablir sa crédibilité et pour la Libye de parvenir à une transition pacifique ? Autant de questions posées par la réalité complexe en Libye et qui suggèrent que le dossier est encore loin d’être clos malgré quelques désirs sincères.
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