Il y a soixante ans, dans la torpeur de l’été, la Tunisie, alors dirigée par Habib Bourguiba, tenta un coup de force sur la base navale de Bizerte encore sous contrôle de la France. Les combats furent meurtriers, particulièrement du côté tunisien, aboutissant à un échec de l’opération voulue par Tunis. La crise de la construction du mur de Berlin à l’été et la volonté farouche du général de Gaulle de tourner la page du conflit algérien avec ce corollaire tunisien firent que l’affaire de Bizerte fut vite oubliée, la France quittant la base navale dès 1963.
Il y a 60 ans - La crise de Bizerte (19-22 juillet 1961) (T 1302)
Chenal d'entrée du port de Bizerte
Sixty years ago, in the torpor of summer, Tunisia, then led by Habib Bourguiba, attempted a coup on the naval base of Bizerte still under French control. The fighting was deadly, particularly on the Tunisian side, resulting in the failure of the operation desired by Tunis. The crisis of the construction of the Berlin Wall in the summer and the fierce will of General de Gaulle to turn the page of the Algerian conflict with this Tunisian corollary caused the Bizerte affair to be quickly forgotten, France leaving the naval base as soon as 1963.
La crise de Bizerte, qui s’est concrétisée par de violents affrontements franco-tunisiens, à l’issue desquels la France eut facilement le dessus, est symptomatique d’une mauvaise analyse de situation, effectuée par le président tunisien, Habib Bourguiba.
Au moment des accords qui ont scellé l’indépendance de la Tunisie, en 1956, il avait été conclu que, compte tenu de son importance, la France conserverait une présence militaire dans la base navale de Bizerte. En effet, située face au Détroit de Sicile, la base contrôle le passage entre les deux bassins de la Méditerranée, l’oriental et l’occidental.
Compte tenu du soutien ouvertement affiché de la Tunisie au Front de libération nationale [algérien] (FLN), les relations entre Paris et Tunis ont toujours été très fraîches. Néanmoins, en février 1961, dans le contexte du désengagement annoncé de la France en Algérie, une rencontre officielle entre les deux chefs d’État, la première, se déroule au château de Rambouillet. Voulant ignorer le franc succès obtenu par son interlocuteur le mois précédent lors du référendum sur l’autodétermination, Habib Bourguiba, mal conseillé, considère la France et son Président, en position de faiblesse, suite à la rupture unilatérale des négociations franco-algériennes par le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Au cours de ces entretiens, le général de Gaulle indique à son interlocuteur que, la France accédant à la capacité nucléaire militaire, il a l’intention d’évacuer Bizerte dans un délai d’un an, en dépit de l’importance de sa position. Cet aveu confirme Bourguiba dans son analyse de faiblesse de la France. En mai, le commandant de la base, l’amiral Amman rend compte au gouvernement que les travaux d’allongement de la piste aérienne, rendus nécessaires par les capacités des nouveaux appareils à réaction, commencent. Comme ces travaux n’ont fait l’objet d’aucun accord préalable franco-tunisien, Habib Bourguiba saisit ce prétexte pour déclencher la crise.
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