Dans cette seconde partie, l'ambassadeur Bertrand Besancenot poursuit son panorama de l'actualité de l'été au Moyen-Orient, en analysant notamment les relations entre Abou Dabi et Riyad, ainsi que le déplacement du Président turc Erdogan dans les pays du Golfe.
Actualités du Moyen-Orient Juin-juillet 2023 (2/2) (T 1508)
L’annonce a d’abord surpris dans un pays sortant de quatre décennies de conflits meurtriers. Un méga projet immobilier à un milliard de dollars, comprenant café, restaurants, mais aussi 4 000 appartements et 2 500 villas, va être construit par l’Arabie saoudite à proximité de l’aéroport de Bagdad. Le fonds souverain du royaume (PIF) a également créé en mai dernier une unité dotée de 3 milliards de dollars pour investir dans plusieurs secteurs irakiens – les mines, les infrastructures, la finance, l’immobilier et l’agriculture – dans le cadre d’un plan de 24 milliards de dollars destiné à six pays de la région. Dans la foulée, la compagnie pétrolière ARAMCO s’est vue confier le développement d’un immense gisement de gaz dans la province de Anbar.
Depuis quelques mois, et particulièrement ces dernières semaines, les déclarations et les promesses d’investissements en provenance du Golfe pleuvent en Irak. Le Qatar a dévoilé, mi-juin, un plan d’investissement de 5 milliards de dollars, en plus des 9,5 milliards de dollars d’accords que des entreprises privées qataries ont signés dans plusieurs secteurs et comprenant la construction de deux centrales électriques dans un pays miné par les coupures. Un peu plus tôt dans l’année, les Émirats arabes unis (EAU) ont promis de débloquer 500 millions de dollars pour lancer la seconde phase d’un projet hydraulique à Sinjar, ville martyre de l’État islamique ; et, dernière annonce en date, le 2 juillet, Riyad et Abou Dabi se sont engagés à verser 6 milliards de dollars (3 milliards chacun) pour renforcer le commerce international avec l’Irak, en soutenant les infrastructures dans le pays et en créant des comités d’affaires conjoints.
Avec cette multitude de projets, une nouvelle page semble se tourner dans les relations irako-golfiques. Riyad et Abou Dabi entretenaient avec Bagdad des relations tendues depuis la première guerre du Golfe et l’invasion du Koweït par Saddam Hussein. Ces tensions se sont accentuées après que la guerre en Irak menée par les États-Unis en 2003 a modifié le système politique dominé par le parti Baas au profit de la majorité chiite, l’Arabie et les EAU étant accusés de soutenir les oppositions sunnites. Les liens se sont davantage crispés ces dernières années quand l’Iran a consolidé son influence politique et la place des milices qui lui sont affiliées dans le pays. Un rapprochement s’était toutefois manifesté lors des mandats des Premiers ministres Haîdar el-Abadi et de son successeur Moustafa el-Kazimi, plus proches des États-Unis. Mais l’arrivée au pouvoir de Mohammad Chia el-Soudani, nommé en octobre 2022 par les partis pro-iraniens dominant le Parlement, a réintroduit de l’incertitude.
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