Il y a 80 ans, la Seconde Guerre mondiale connaissait un tournant stratégique majeur. Dans une nouvelle série en trois parties, le colonel Claude Franc analyse cette période de l'été 1943, autour de la bataille de Koursk.
Le tournant de la guerre à l’Est, été 1943 (1/3) Les Soviétiques redécouvrent l’art opératif (T 1513)
© Diorama de la bataille de Koursk, Belgorod
Il est couramment admis que la bataille de Koursk, l’opération Citadelle voulue et décidée par Hitler au printemps 1943, a constitué le point de bascule de la guerre sur le front oriental, l’initiative passant définitivement dans le camp soviétique. C’est vrai, mais trop réducteur. En fait, c’est une conjonction de facteurs, comme souvent, qui aboutit à ce résultat. Au premier rang de ceux-ci, il faut placer la remarquable adaptation de l’armée soviétique, au bout de deux années de guerre, qui aboutit par un réaménagement profond de l’organisation du commandement. Cette approche plus réaliste de la façon de conduire les opérations a amené à l’élaboration d’une nouvelle doctrine, afin de redécouvrir ce qui avait fait sa spécificité dans l’entre-deux-guerres : l’art opératif.
Codifié par les militaires bolchéviques Frounzé et Svetchine, ce nouvel art de conduire les opérations souffrit d’avoir été promulgué et mis en avant par le théoricien militaire Toukhatchevski, la première victime des grandes purges staliniennes de l’Armée rouge en 1937. Il tomba donc dans les oubliettes de l’histoire et c’est en croisant les enseignements tirés de leurs désastres initiaux avec leur culture militaire propre que les Soviétiques redécouvrirent, de façon pragmatique, l’art opératif, clé de leurs succès dans la seconde partie de la guerre. En effet, cette avancée conceptuelle soviétique fut le fruit d’une démarche uniquement pragmatique, à l’exact opposé de la rigueur de la dialectique marxiste-léniniste. Il fallait rechercher des réponses pratiques posées par une question simple : comment mettre en œuvre la supériorité militaire que les Soviétiques venaient d’acquérir à l’issue de la bataille de Stalingrad, pour aboutir, au plus vite, à la défaite de l’Allemagne ?
Il y a donc lieu de s’y arrêter avant de traiter la bataille de Koursk proprement dite.
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