Cette semaine, le général Pellistrandi s'interroge sur la suite de la quinzaine olympique sur le plan international. La trève olympique, avec les actions en Ukraine, en Russie et au Proche-Orient est loin d'avoir été respectée. Après la parenthèse des JO de Paris, la réalité de la géopolitique, comme celle de la politique nationale, est bel et bien de retour – si tant est qu'elle avait été mise en sommeil.
Éditorial – JOP de Paris 2024 : Et après ? (T 1623)
© Iliya Mitskavets / Adobe Stock
Il y a encore quelques semaines, il était de bon ton pour les représentants des partis politiques des deux extrêmes de dénigrer à longueur de plateaux télé les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024. Pour les uns, échec sécuritaire garanti et, pour les autres, des Jeux sans intérêt autre que la promotion du sport business et d’une compétition qui serait, par nature, anti-démocratique. Échec sur toute la ligne pour ces corbeaux noirs de mauvais augure qui, au final, ont dû cesser de tweeter sur le réseau social X pendant cette quinzaine olympique qui est un vrai succès sportif, organisationnel et populaire. Le temps des polémiques enflammées sur l’avenir politique du pays est, hélas, déjà revenu dès ce lundi matin. Avouons-le, néanmoins, les visages des sportifs de tous les pays ont avantageusement remplacé certaines figures politiques – imbues de leur arrogante superbe – capables seulement de dénigrer les autres et de préférer le chaos à la concorde.
Paris a effectivement été au centre du monde du point de vue géopolitique, n’en déplaise à Vladimir Poutine, l’un des grands perdants de cette quinzaine olympique – la Russie étant absente des JOP en raison des sanctions internationales. À l’inverse, la Chine a su jouer de son soft power sportif, même si les États-Unis sont parvenus in extremis à conserver la tête du tableau des médailles. Même la Corée du Nord peut se réjouir de sa participation, avec six médailles et quelques sourires pour témoigner d’une très petite ouverture. Et sans oublier Cuba, plus à l’aise aux JOP que sur son alliance avec Moscou.
La Russie a effectivement beaucoup perdu durant cette période, d’autant plus que la guerre en Ukraine a pris un tournant spectaculaire avec l’incursion blindée dans la région de Koursk. Kyiv a décidé de porter la guerre sur le territoire russe, dans une zone faiblement protégée, semant ainsi la panique dans les couloirs du Kremlin avec cette « invasion » de son sol. Il s’agit certainement d’une opération limitée dans le temps et l’espace, pas question de vouloir conquérir Moscou. D’autres, par le passé, l’ont tenté et ont tout perdu. Toutefois, avec cette action audacieuse, Kyiv déstabilise à bon compte l’état-major russe et démontre que le slogan des officiels de Moscou : « le plan se déroule conformément à la planification », n’est pas la réalité. Certes, sur le front du Donbass, les troupes russes ont l’initiative et grignotent du terrain, mais toujours sans trouver la solution tactique permettant de briser la défense de fer ukrainienne et d’imposer alors une solution politique défavorable à Kyiv. Il va falloir observer dans les prochains jours la suite de cette offensive. S’agit-il de prendre un gage territorial pour négocier, d’attirer les forces russes pour soulager les autres fronts, de se replier en bon ordre tout en envoyant un signal fort, de conforter l’opinion publique ukrainienne après un printemps difficile et avant que l’hiver ne vienne fragiliser la situation humanitaire, de rappeler au monde que la guerre continue ? En tout cas, les 12 médailles dont 3 en or récoltées à Paris sont autant de réussite pour un pays agressé depuis près de 900 jours.
Autre front inquiétant pour la stabilité du monde : le Proche-Orient après l’élimination du chef politique du Hamas, Ismaël Haniyeh, le 31 juillet à Téhéran. L’opération spectaculaire mais non revendiquée a brutalement déstabilisé le régime iranien alors même que le dirigeant du Hamas était présent pour célébrer l’intronisation du nouveau président de la République islamique d’Iran – une humiliation majeure pour le pays. Depuis, après les discours incendiaires annonçant des représailles massives, les acteurs régionaux et internationaux retiennent leur souffle et la diplomatie est à l’œuvre pour éviter un embrasement de cette partie du monde. Certes, il y a eu les frappes (sans succès) de l’Iran au mois d’avril dernier contre le territoire israélien, mais là, l’ampleur annoncée est bien supérieure compte tenu du caractère spectaculaire de l’action du 31 juillet. Les États-Unis ont augmenté très rapidement leur présence militaire, tandis que Téhéran se retrouve bien seul, hormis le soutien de ses proxys, à savoir le Hamas, le Hezbollah libanais et les Houthis du Yémen. Des tirs de missiles balistiques et de drones contre Israël sont toujours possibles, mais l’appareil militaire iranien est trop dissymétrique pour soutenir un effort de guerre prolongé. Toutefois, l’Iran est bien obligé de réagir pour ne pas perdre la face.
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En cette mi-août, après la quinzaine qui a permis à la France de retrouver un peu d’oxygène et de confiance en elle-même, la marche du monde se poursuit avec, comme prochain rendez-vous politique majeur, les élections américaines. Et là encore, la quasi-certitude d’une élection de Donald Trump qui semblait acquise surtout après la tentative d’assassinat, n’est plus de mise avec le début de la campagne de Kamala Harris qui bouscule les sondages et démontre que rien n’est encore joué. Et tous ceux qui ont jusqu’à présent parié sur une victoire de l’ancien président républicain pourraient, au final, le regretter. Cela signifie aussi que les États-Unis restent la puissance majeure, dont l’influence mondiale est toujours une réalité.
Après Paris 2024, bienvenue à Los Angeles 2028. ♦