Dans cette première livraison, l’auteur rappelle les étapes récentes de l’actuelle question touarègue qui était marquée par un équilibre précaire entre dissidents algériens, touaregs, armée malienne et trafiquants variés dans le nord du Mali. Cet équilibre bascule avec la question libyenne.
La question touarègue (1/3) (T 240)
Les Touaregs, appelés communément les hommes bleus du désert, sont répartis entre l’Algérie, le Mali, la Libye et le Burkina Faso. Leur nombre reste incertain. Il varierait entre 1,5 et 4 millions, ce dernier chiffre se rapprochant sans doute de la réalité. Après une dernière rébellion en 2006 pour obtenir leur autonomie et/ou une amélioration de leurs conditions de vie, les Touaregs maliens se sont ligués à nouveau en 2012 profitant de la révolte en Libye. Cette rébellion va avoir des conséquences inattendues : la conquête du Nord et un coup d’État. Et des rivalités entre groupes maliens mais aussi avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), la nouvelle étiquette sous laquelle se regroupent des dissidents algériens.
Ils sont établis au Mali dans l’Azawad, un territoire presque entièrement désertique situé au Nord dans une zone de transition entre l’espace saharien et l’espace sahélien. La toute première revendication des Touaregs remonte en 1963, date à laquelle ils réclament l’autonomie de la région. Ne pouvant l’obtenir, ils prennent une nouvelle fois les armes en 1990, soit deux ans après la création du Mouvement populaire de libération de l’Azawad, le MPLA. Au cours de cette révolte émergent des figures telles que Bahanga Ibrahim, son cousin Mohamed Najim et Yyad Ag Ghaly. Ce dernier d’origine malienne, est un des tout premiers à avoir pris les armes ; il a répondu en 1980 à l’appel des Touaregs lancé par Kadhafi. En contrepartie de l’obtention de la nationalité libyenne et de certains avantages, ce dernier qui a été intégré à « l’armée verte » de Kadhafi, a combattu au Liban pour le compte du Guide libyen. C’est un chef respecté, car issu d’une tribu noble, celle des « Iforas ». En cela, il tient à être consulté pour toute initiative ayant trait à la région de Kidal. Ses revendications sont en 1990 : un statut particulier pour la région qu’il n’associe nullement, dit-il « à une demande d’indépendance, ni d’autonomie, encore moins de fédération ou d’indépendance ». Son premier souci est, selon lui, que ce statut tienne impérativement compte de « la spécificité nomade » de la zone et autant que ses besoins économiques très importants, compte tenu de l’aridité de la région.
Cette rébellion a abouti à la signature des accords de Tamanrasset en 1991 et du Pacte national en 1992 qui mettront fin au conflit. Quelques années plus tard, les autorités maliennes sont confrontées à un autre problème : l’arrivée du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) au Nord du Mali, en 2002. Alors qu’il mène un combat féroce contre les autorités algériennes, ce groupe dissident a été bouté hors des frontières algériennes et a trouvé refuge dans l’Azawad. Manifestement son arrivée au Mali est bien perçue et le GSPC est pris directement en main par les Arabes maliens, grands trafiquants de drogue qui depuis des lustres ont leurs relais discrets auprès des autorités locales, les députés, les notables, la police, les services de la gendarmerie, l’armée et surtout les douanes. « Pendant environ 3 ans, de 2009 à 2012, AQMI a eu des contacts téléphoniques ou directs avec certains officiers de la base de Aguelhok, située entre Anefis et Tessalit », explique une source malienne, confirmant ainsi les relations étroites entre les groupes et l’armée régulière.
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