Le Sahel, en particulier au Mali, est une vaste zone propice au trafic de drogue. Les stupéfiants et leur commerce illégal contribuent directement à la déstabilisation du Mali par de multiples acteurs externes dont les cartels sud-américains producteurs de cocaïne, mais aussi internes avec une compétition malsaine entre groupes armées rivaux pour contrôler cette manne d’argent.
Le trafic de drogue au Mali, un facteur de déstabilisation supplémentaire (T 825)
Drug trafficking in Mali, an additional destabilizing factor
The Sahel, particularly in Mali, is a large area for drug trafficking. Narcotic drugs and their illegal trade contribute directly to the destabilization of Mali by multiple external actors including South American cocaine-producing cartels, but also internal with an unhealthy competition between rival armed groups to control this manna of money.
Récemment en compétition au festival du film francophone d’Angoulême (23 au 28 août 2016), le thriller intitulé Wulu traite d’un point de vue sociétal le sujet du trafic de drogue au Mali. Il retrace notamment la généalogie de la banalisation des stupéfiants dans ce pays et en explique les retombées économiques et géopolitiques, de l’affaire « Air Cocaïne » à l’invasion du Nord-Mali (cf. Sébastien Jédor). D’abord tabou dans un pays gangrené par la corruption, le trafic a depuis lors été largement imputé par les Maliens du Sud aux autonomistes et indépendantistes de l’Azawad, traités de « narco-terroristes ».
Si les collusions entre groupes armés et trafiquants sont évidentes, cette facilité de langage permet néanmoins d’occulter grandement les complicités au Sud-Mali, rappelées par Wulu avec finesse. En effet, si le Mali est une plaque tournante du trafic de stupéfiants, il est surtout au cœur d’un réseau ayant pour base l’Amérique du Sud, puis les grands ports d’Afrique de l’Ouest avant d’emprunter les autoroutes transsahariennes vers le Maghreb. La complexité des intérêts en jeu n’a d’égale que celle de la scène politique malienne, où tentent de se réinsérer pêle-mêle, barons de la drogue, seigneurs de guerre et autonomistes dans un climat électrique marqué par le procès du capitaine putschiste Sanogo. Dans le chaos politique ambiant, il s’agit donc de se demander à qui profite le crime, et donc par extension à qui bénéficie cette manne et quelles en sont les conséquences pour le Mali.
Une terre de trafics
Situé au cœur du réseau transsaharien, à distance acceptable à la fois des ports d’Afrique de l’Ouest et du Maghreb, le Mali est historiquement un pays de trafics, plus récemment de drogue. Sa prédilection pour la cocaïne remonte au début des années 2000, du fait des cartels colombiens et vénézuéliens. Une enquête de RFI datée de 2007 révélait déjà l’ampleur de ce commerce florissant en provenance de la Colombie et transitant par la Guinée-Conakry (cf. Christophe Champin), voire la Guinée-Bissau. Le déclenchement de l’opération Enduring Freedom Trans Sahara démontra, dès février 2007, l’inquiétude des Américains concernant la montée en puissance du trafic de drogue et d’armes au Sahel. La découverte d’un Boeing 727-200 avec 10 tonnes de cocaïne à bord en novembre 2009 permit de médiatiser un trafic peu évoqué et de mieux saisir la complexité des responsabilités dans cette affaire marquée par les pressions de tout poil.
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