70 ans des combats de la RC4
9 octobre : la panique gagne le commandement
9 octobre : la panique gagne le commandement
Carte de la RC4 (ONAC : www.caobang.fr/)
En avant de That Khé, où parviennent toujours des isolés, le groupement parachutiste du capitaine Cazaux parvient à faire sa jonction avec les deux compagnies de Labaume, déployées en recueil en avant de Pont-Bascou. Labaume recueille et intègre à son groupement deux goums réduits du 11e Tabor, unité qui a su conserver sa cohésion.
Pour encager et piéger les survivants en arrière de That Khé, dont le Vietminh a bien saisi que le poste constituait la planche de salut, l’ennemi fait sauter le grand pont qui enjambe le Song Ki Cung. La retraite des survivants – et du groupement mixte Cazaux / Labaume – se trouve donc coupée à hauteur de cet obstacle. Le franchissement est organisé à base de six embarcations de type M2 (1), manœuvrées par le Génie.
En soirée, Labaume reçoit l’ordre de franchir avec le 11e Tabor et de rallier au plus vite That Khé, le 3e Bataillon colonial de commandos parachutistes (3e BCCP) de Cazaux, assurant la couverture de ce repli. À leur arrivée, les goums des deux tabors recueillis (les 3e et 11e Tabors) sont rééquipés et réarmés, leur repli se poursuivant, partie en camions, partie à pied, en avion pour les blessés, vers Lang Son.
Ces ordres sont la conséquence directe de la panique qui commence à s’emparer du commandement. Comme souvent, ce phénomène de panique – qui empêche de juger sainement la situation – est inversement proportionnel à l’euphorie qui régnait au lancement de l’opération. Le général Alessandri, commandant les Forces terrestres au Nord Vietnam, a rejoint Hanoï – de retour de métropole – et y découvre toute l’étendue du désastre d’une opération à laquelle il s’est toujours montré opposé. Alors que personne dans son entourage ne le contre, il ne parle plus que de rétracter tout son dispositif sur l’axe Hanoï-Haïphong.
À Lang Son, le colonel Constans, commandant la Zone Frontière du nord-est (ZFNE), et qui commande l’opération (2), reçoit deux ordres. D’une part, être en mesure de recueillir la garnison de That Khé, grossie des survivants des deux colonnes, la décision ayant été prise d’évacuer ce poste le lendemain ; et, plus grave (car cet ordre va le priver de toute liberté d’action) d’évacuer sur Hanoï l’artillerie (une batterie de canons 155 HM1) qui défend Lang Son, d’autre part. Constans, qui doit se préparer à exécuter le premier ordre, n’a pas la présence d’esprit de ne pas exécuter, ou au moins de prudemment différer l’exécution du second.
Des décisions qui ont comme conséquence la perte complète de la ZFNE, ce qui découvrira totalement le nord du Tonkin. Rien ne justifie ces décisions, sinon une impression de situation subjective, sous la pression d’événements dramatiques.
(1) Barque d’assaut pour patrouille amphibie pouvant emporter une quinzaine d’hommes.
(2) En plus de son régiment, le 3e Régiment étranger d’infanterie (3e REI), Constans exerçait le commandement territorial de la Zone frontière, soit l’ensemble des postes jalonnant la RC 4 de Cao Bang à Mao Khé, c’est-à-dire sur plus 200 kilomètres. En outre, il a reçu le commandement d’une opération mettant en jeu 8 bataillons, en intégrant le bataillon Cazaux, ce qui constitue de nombreuses responsabilités pour un simple colonel, qui ne dispose comme personnels et moyens de commandement que de son Poste de commandement (PC) régimentaire
Publié le 09 octobre 2020
Claude Franc