Discours de la ministre des Armées, aux marins de la base de défense Brest-Lorient
« Monsieur le Préfet maritime,
Madame et messieurs les parlementaires,
Messieurs les élus,
Messieurs les amiraux,
Officiers, officiers mariniers, quartiers maîtres et matelots,
Mesdames et messieurs,
Personne ne dit qu’il « passe » par Brest. Chacun dit qu’il « va » à Brest, comme on dirait que l’on va au bout du monde, admirer l’océan aux confins des terres. Ce « Penn-ar-Bed », à la tête du monde, fait la fierté de notre pays. Il est, depuis tant d’années, essentiel pour notre défense.
Brest est l’un des berceaux de la défense française : je le dis avec une pensée particulière pour l’Île Longue, où se trouve le cœur battant de la composante océanique de notre dissuasion nucléaire. Le 29 janvier 1972, il y a tout juste 50 ans, le premier sous-marin français porteur de l’arme nucléaire, Le Redoutable débutait sa première patrouille opérationnelle. Depuis ce jour, pas un seul ne s’est écoulé sans que nos SNLE ne portent sous les mers le gage de notre souveraineté.
Mais je ne suis pas venue vous parler du passé ou de notre longue histoire militaire et industrielle que vous connaissez par cœur. Encore moins en ce vendredi des vacances, qui marque le début des permissions pour bon nombre d’entre vous. Je tiens d’ailleurs à vous remercier de votre accueil, à quelques heures d’un repos mérité. Merci, c’était important pour moi de revenir dans le Finistère – c’est d’ailleurs ma 14e visite depuis 2017 – et de revoir Brest, pour vous parler d’aujourd’hui et pour vous parler de notre avenir.
Parce qu’ici, à Brest, se joue une part de l’avenir de notre pays et de l’Europe. La première réunion informelle des ministres de la défense sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne il y a quelques semaines en est la parfaite illustration.
Vous connaissez l’adage mieux que quiconque : « Notre défense commence au large. » Alors que les tensions s’accroissent aux quatre coins du monde et que la compétition stratégique s’intensifie, en particulier dans les espaces communs, la mer devient le champ idéal de la contestation et de l’affirmation des puissances. C’est le constat que nous avons dressé de l’état du monde en 2017.
Près de cinq ans plus tard, ces tendances que nous observions n’ont fait que se renforcer et s’accélérer. Le monde a changé. Notre défense aussi. En 2017, j’ai découvert une Marine marquée par de nombreuses années d’incessantes restructurations. Pendant des années, avec un budget en réduction, la Marine était censée faire plus avec moins.
Vous qui donnez tout pour votre pays, vous méritiez que l’on se batte pour vous ! Vous méritiez de meilleures conditions de travail, de vie et d’entraînement. C’était, et c’est toujours, la conviction du président de la République qui a voulu une loi de programmation militaire ambitieuse pour amorcer la remontée en puissance de nos armées.
Cette LPM, ce sont 295 milliards d’euros consacrés à notre défense sur la période 2019-2025. 26 milliards d’euros supplémentaires depuis 2017. C’est surtout un effort sans précédent depuis 30 ans et un budget respecté à l’euro près depuis 3 ans, et cela ne s’était pas vu depuis des décennies.
Cette LPM, elle est synonyme de renouveau pour la Marine nationale. Depuis 2017, Brest et sa Marine changent de visage.
1/ Nous avons renouvelé nos capacités opérationnelles : je pense aux frégates multi-missions dont la 8e sera livrée cette année, je pense évidemment au lancement de la construction des frégates de défense et d’intervention.
J’ai aussi pris la décision dès 2017 de renouveler la totalité de la flotte des patrouilleurs destinés aux outre-mer et aux côtes métropolitaines.
2/ Nous avons aussi préparé l’avenir en garantissant notre autonomie : ainsi, la LPM 2019-2025 nous a permis de poursuivre le programme de sous-marins nucléaire d’attaque Barracuda, dont le premier, le Suffren, entrera au service actif très prochainement et de lancer la 3e génération de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, qui entrera en service à partir de 2035.
Enfin, le président de la République a pris la décision de renouveler la composante océanique, comme aérienne, de notre dissuasion nucléaire et a lancé le programme du porte-avions nucléaire de nouvelle génération.
3/ Nous avons aussi mis l’accent sur l’innovation, avec 1 milliard d’euros d’investissements, et sur l’adaptation à notre environnement stratégique. Pour mieux faire face aux menaces hybrides qui ont le vent en poupe, nous avons élaboré plusieurs stratégies de défense dans le cyberespace, dans l’espace ou encore dans le domaine de la lutte informationnelle. Cet effort sera renforcé dans les prochaines semaines, je présenterai prochainement avec le chef d’état-major des armées une stratégie ministérielle de maîtrise des fonds marins.
En quelques mots : depuis près de 5 ans, nous bâtissons la Marine des 50 prochaines années. Une Marine de combat, à la pointe des défis technologiques, capable d’assurer notre défense au meilleur niveau sur et sous toutes les mers du monde.
La base de défense de Brest-Lorient, forte de plus de 20 000 personnes, incarne toutes les priorités de la loi de programmation militaire. Ici, la LPM prend corps et montre peu à peu ses effets et notamment dans sa dimension « à hauteur d’homme », qui a vocation à améliorer votre vie au quotidien, ainsi que celle de vos familles.
En trois ans, nous avons investi plus de 33 millions d’euros pour rénover près de 750 places d’hébergement.
Vous le savez, j’accorde une importance fondamentale à vos familles. Leur soutien est ce qu’il y a de plus précieux à nos missions. Et chacun sait que sans base-arrière, il n’y a pas d’armées victorieuses. Avec le Plan Famille, nous avons fait un effort particulier sur les solutions de garde d’enfant : plus de 250 conventions avec des assistantes maternelles, dont 39 à Brest, ont été signées afin de vous offrir plus de flexibilité dans les horaires de garde. 39 berceaux supplémentaires ont été créés dans les crèches du ministère des Armées permettant d’avoir plus de 350 places de crèche dans la base de défense. Enfin, afin d’offrir une meilleure qualité de vie au plus grand nombre d’entre vous, 100 logements sont en cours de rénovation à Brest, dont 40 ont déjà été livrés.
Sur la base de défense de Brest-Lorient, un effort considérable a aussi été fourni pour renouveler toutes nos infrastructures opérationnelles. 242 millions d’euros ont été investis dans des projets qui ont été livrés ou seront livrés cette année. Parmi ces projets, il y a notamment les infrastructures Rafale à Landivisiau, les infrastructures FREMM et Barracuda de la base navale de Brest (plus de 100 M€), les nouvelles infrastructures de la base des fusiliers-commandos de Lorient.
Ce mouvement d’ampleur n’en est qu’à ses débuts : au cours des 5 prochaines années, plus de 500 millions d’euros seront investis pour des projets d’infrastructures sur la base de défense, et ce, sans compter les infrastructures de la dissuasion. Ce sont autant de projets qui participent activement au dynamisme économique de la région et à l’activité des entreprises du BTP.
Parmi ces projets, il y a le projet BAGAD dont je poserai la première pierre tout à l’heure. BAGAD qui signifie « Bâtiment Agile et Adaptable » et qui vise à rénover l’ensemble des infrastructures accueillant le pôle de la force d’action navale à Brest. Concevoir ce bâtiment a été un réel défi technique. Il a fallu tenir compte des nombreuses contraintes techniques liées à l’existant, à l’environnement marin et aux exigences en matière de cybersécurité. Enfin, la composante énergétique a été pleinement prise en compte, grâce à une démarche industrielle et logistique réfléchie
Et je tiens à saluer le Service d’infrastructure de la défense, l’ESID de Brest et les entreprises qui sont représentées aujourd’hui pour leur travail.
Ce travail de construction et de rénovation est essentiel. On pense souvent au renouvellement des équipements, aux nouveaux bâtiments, mais on oublie trop souvent que sans infrastructures pour les accueillir et pour les entretenir, c’est toute notre capacité d’action que l’on condamne.
À Brest, ces nouvelles infrastructures vous permettent d’accueillir dans de bonnes conditions les livraisons de la LPM, notamment les FREMM, les bâtiments de soutien BSAM, l’ensemble des Rafale Marine au dernier standard, ou encore le premier système de lutte anti-mines du futur SLAM-F que nous aurons l’occasion de voir aujourd’hui.
Bientôt, vous recevrez aussi les FDI, les patrouilleurs océaniques ou encore les hélicoptères Guépard Marine : sur ce dernier point, je m’en suis encore assurée il y a quelques semaines en me rendant à Marignane, pour passer la plus grande commande d’hélicoptères de l’histoire de la Ve République : sur 169 Guépard commandés, dont 49 iront à la Marine.
Enfin, je voudrais évoquer la mise en œuvre du concept de double équipage pour les FREMM. C’est une réforme emblématique que j’ai souhaité expérimenter, qui est entrée progressivement en vigueur à partir de 2019 pour les frégates soumises à des alertes très contraignantes, avec l’objectif de permettre une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie privée.
Aujourd’hui, les FREMM Aquitaine et Bretagne sont aujourd’hui à double équipage. Et l’objectif est atteint. C’est un motif de satisfaction important qui apporte des plus-value opérationnelles indéniables. Nous l’avons vu lors de la relève d’équipage de la FREMM Bretagne à Reykjavik en décembre dernier : cette relève nous a permis pour la première fois d’assurer une présence maritime optimisée en océan Atlantique.
Officiers, officiers mariniers, quartiers maîtres et matelots,
« La mer est un espace de rigueur et de liberté », c’est ce qu’écrivait Victor Hugo. Je le crois.
Aujourd’hui, nous avons aussi besoin de beaucoup de rigueur pour protéger notre liberté sur et sous les mers. Nous avons besoin de passion et d’ambition. Vous avez la première, la passion, la LPM s’est attachée à vous offrir la seconde ; l’ambition et les moyens de porter cette ambition. Et je veux remercier chaleureusement les parlementaires qui sont parmi nous, qui ont soutenu et voté cette loi qui fait la différence.
Depuis près de 5 ans, notre Marine a changé de visage. Nous avons parcouru beaucoup de chemin, de nautiques pourrais-je même dire. Cette loi de programmation militaire 2019-2025 est notre cap pour les 3 prochaines années et il nous faudra continuer de le tenir, fermement.
J’ai une confiance entière en chacune et chacun d’entre vous. Notre Nation toute entière peut s’inspirer de la rade de Brest. Et en me tenant devant vous, je suis fière, fière de commander des femmes et des hommes libres, prêts à se donner pour la France.
Vive la République ! Vive la France ! » ♦
Publié le 08 février 2022