Contrairement à ce que son titre semble suggérer, le livre du général Walter Warlimont n’est ni un livre de souvenirs, ni un livre d’histoire, mais un livre sur la prise de décision au niveau stratégique. Adjoint de Jodl, le chef des opérations à l’état-major général de la Wehrmacht (OKW), l’auteur nous permet de comprendre comment à partir de 1941, les échecs successifs des armées allemandes prennent leur source dans un processus décisionnel incohérent où toute décision émane d’Adolf Hitler, chef suprême des armées depuis 1938, lequel à la différence d’un Moltke, « au calme inébranlable » en 1866 et 1870, est guidé par ses émotions et non par une réflexion stratégique rationnelle.
Les différents états-majors (armée de terre, Kriegsmarine et Luftwaffe) se trouvent alors confinés dans des tâches d’exécution, où les officiers de qualité qui les composent ne peuvent aucunement apporter leur expertise.
Apparaît ainsi pleinement l’absurdité de certaines décisions, telle que celle d’attaquer la Russie, prise par Hitler dès juillet 1940, avec un début des opérations souhaité à l’automne de la même année ! De même, ce que Warlimont qualifie de « querelle des objectifs » en 1941 : là où l’état-major souhaitait poursuivre un objectif unique, Moscou, Hitler dispersa l’armée allemande dans trois directions différentes, ce qui dispersa son potentiel.
Dans la phase défensive de la guerre à l’Est, la règle de conduite imposée par Hitler, « conserver ce qui avait été gagné, regagner ce qui avait été perdu et ne jamais renoncer nulle part », occasionna ensuite des pertes énormes qui ne seront jamais compensées, là où seule une défense élastique aurait permis de sauver ce qui pouvait encore l’être.
Faisant parfois appel, pour compléter son témoignage, aux procès-verbaux des conférences journalières de situation, dont la plupart ont été perdues après la guerre, Warlimont nous donne ainsi une description au scalpel de cinq années de guerre observées par le bout de la lorgnette d’un officier d’état-major.