Grâce à son aptitude à superviser et diriger des opérations aériennes (« C2 » Air), l'Armée de l'air est un réel instrument de puissance offrant à la France une capacité-clé majeure pour l'exécution de ses responsabilités internationales.
Capacités C2 de l'Armée de l'Air, un coeur stratégique au profit de la défense et de la sécurité nationale
Un C2 robuste et crédible issu d’une longue expérience au service de la mission de sûreté aérienne
Les enseignements de la deuxième guerre mondiale consacrent l’importance de l’acquisition de la supériorité aérienne en préalable à toute action militaire et se traduisent pour la France et la protection de son territoire par la nécessité de bâtir une défense aérienne crédible et efficace. L’Armée de l’air acquiert progressivement les outils (radars, systèmes de communication, vecteurs) et le savoir-faire (procédures et compétences du personnel) qui découlent de ce besoin : établissement et appréciation de la situation aérienne générale, capacité d’identification des menaces et guidage des intercepteurs sur les cibles potentielles. Compte tenu de la nécessaire réactivité liée à la mission, l’unicité du commandement s’impose et en 1961 l’Armée de l’air créé une structure centralisée dédiée à la défense aérienne. Ce commandement fédère l’ensemble des moyens, du réseau maillé de détection aux avions d’interception, et permet de fournir en temps réel les éléments d’appréciation de la situation au profit du Premier ministre, autorité politique responsable de la défense aérienne du pays. Cette chaîne extrêmement réactive relie le sommet de l’État au pilote dans son aéronef et assure, en tous lieux et en toutes circonstances, la souveraineté de l’espace aérien national. Aujourd’hui, le dispositif français de sûreté aérienne permet la surveillance des quelques 11 000 mouvements aériens quotidiens et peut déclencher soit une mission d’interception en vue d’effectuer des mesures actives de sûreté aérienne soit une mission d’assistance à un aéronef en difficulté. Les évènements du 11 septembre 2001 ont souligné toute la pertinence du dispositif de sûreté aérienne mis en place par la France, reconnu comme l’un des mieux adaptés pour lutter contre la menace terroriste.
Permanence, réactivité, mise en place de règles d’engagement, réussite de la mission structureront également de manière durable la culture de l’aviateur acquise au travers de son expérience de la mission de sûreté aérienne.
De même, l’Armée de l’air a très tôt intégré la nouvelle dimension que l’espace joue désormais dans le quotidien de la vie de la nation et de sa sécurité. Elle a étendu ses capacités d’évaluation de situation et de surveillance à ce nouveau domaine et en a structuré la diffusion d’alerte relative aux menaces dont il peut être porteur (retombée de débris extra-atmosphériques, trajectographie des satellites d’observation etc.).
Développement d’un véritable savoir-faire en matière de conduite des actions aériennes d’ampleur sur les théâtres d’opérations à l’étranger
Les bouleversements géopolitiques à partir des années 90 conduisent la France à intervenir de plus en plus souvent hors de ses frontières dans un cadre interarmées et interalliés. Les missions aériennes mobilisent désormais des dispositifs d’aéronefs complexes par leur nombre, leur diversité et la multiplicité des effets à obtenir sur un adversaire pensé comme un système global et présentant des vulnérabilités.
L’Armée de l’air française s’adapte à cette nouvelle donne. Forte de sa culture du commandement acquise au travers de la défense aérienne et s’appuyant sur un personnel rompu à des processus relativement proches, elle accole à sa structure existante en métropole les compétences et outils dédiés aux opérations aériennes extérieures. Le Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA) est créé : outre la mission de défense aérienne dont il a la charge, ce commandement entretient et développe l’expertise de l’Armée de l’air au commandement des opérations aériennes ; il forme son personnel (1) fournit les infrastructures d’accueil fixes ou mobiles et les processus adaptés qui permettent toute la flexibilité nécessaire aux opérations à mener.
Ce mouvement s’inscrit en parallèle des évolutions conceptuelles et doctrinales de l’Otan. La mise sur pied d’une force de réaction décidée au Sommet de Prague en 2002 constitue un outil puissant de développement de l’interopérabilité entre les pays membres. La crédibilité de l’Armée de l’air reconnue par l’ensemble de ses alliés, par ailleurs confortée par l’expertise technique que les industriels français ont su développer en matière de réseaux de commandement et de communication, lui permettent de prétendre naturellement au commandement de la force de réaction de l’Otan (NRF). Il constitue aujourd’hui une contribution essentielle aux capacités opérationnelles de l’Alliance.
Lyon, un cœur stratégique pour superviser les missions aériennes en France et à l’étranger
Ainsi, la capacité à commander et conduire les opérations aériennes (C2) s’impose comme la condition sine qua non de l’efficacité opérationnelle d’une Armée de l’air et donne au pays qui la possède une véritable force d’influence et d’entraînement au service de la coalition mise en place pour répondre à la situation de crise ou d’urgence.
Aujourd’hui, l’évolution des technologies de l’information ouvre des perspectives plus larges encore. On peut voir se dessiner, à moyen terme, de nouveaux équilibres dans le commandement des opérations conjuguant encore plus étroitement les synergies entre des moyens déployés de plus en plus légers et le centre permanent de commandement et de conduite Air de Lyon. Ce dernier développe progressivement ses capacités de superviser, diriger et coordonner en permanence et avec réactivité l’ensemble des missions aériennes que la France pourrait être amenée à réaliser au-dessus ou hors de son territoire national. La maîtrise d’une capacité C2 projetable permettra par ailleurs à la France d’assumer son rôle de nation-cadre en coalition.
Vers une coopération élargie au profit de la sécurité nationale
Les besoins d’évaluation de la situation aérienne ont également conduit à l’ouverture à l’interministériel. De là s’est développée une coopération avec les douanes, l’aviation civile, la Police nationale et la Gendarmerie nationale. Des missions sont régulièrement réalisées au profit de ces entités (2).
Ces exemples de coopérations fructueuses laissent entrevoir des perspectives qui aujourd’hui n’ont pas encore été complètement explorées. Il s’agit de s’interroger sur le potentiel que peut offrir un outil aussi performant et ouvert que ce qui existe sur Lyon au profit de la sécurité nationale comprise dans son acception la plus large, c’est-à-dire non limitée aux menaces militaires. Ainsi, en cas de catastrophe naturelle ou industrielle, le ministère de la défense peut être en mesure, sous faible préavis, de mettre à disposition d’un préfet et sous son autorité, la structure C2 de Lyon et une partie de ses ressources humaines et matérielles, afin que ce dernier puisse exercer ses responsabilités en matière d’appréciation de situation et de coordination des moyens de l’État engagés dans les opérations de secours. Dans le registre de l’optimisation des moyens de l’État au quotidien, les missions d’entraînement des drones de l’Armée de l’air, qui offrent des capacités en matière de surveillance, d’endurance et de discrétion, pourront être valorisées par le choix de zones spécifiques d’intérêt au profit d’un ministère, et ce à partir du C2 de Lyon où sont programmées les missions aériennes.
Ainsi, l’optimisation de ses ressources humaines et matérielles conduit l’Armée de l’air à concentrer ses structures décisionnelles et maintenir la décentralisation de ses capacités d’action : un C2 fort à Lyon s’appuyant sur un réseau de bases aériennes en métropole, à l’outre-mer voire à l’étranger, points de départ de toute action aérienne. Cette nouvelle structure de C2 Air apparaît comme le cœur stratégique où pourra se construire une coopération élargie des ministères engagés dans la mission de sécurité nationale. Enfin son ouverture à l’Europe est envisageable et constitue un atout supplémentaire. Elle peut contribuer au développement de capacités européennes de planification et de conduite civilo-militaires au service de l’approche globale de réponse aux crises et situation d’urgence. ♦
(1) Le Centre d’analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes (CASPOA), créé en 1997, est devenu « un centre d’excellence » de l’Otan et forme, en plus du personnel français, nombre d’étrangers au commandement et à la conduite des opérations aériennes ;
(2) Missions aériennes de reconnaissance photographique au profit de dossiers d’objectifs en soutien préalable à l’intervention de forces de police ; surveillance de l’espace aérien autour d’installations sensibles (centrales nucléaires, sites pétrochimiques, établissements pénitentiaires,…) ; surveillance de manifestations à l’occasion d’évènements de grande visibilité (sommets de chefs d’État, Jeux olympiques) ; suivi de plan de vol d’aéronefs suspectés de se livrer à des activités illicites.