Union française - Difficultés au Maroc pour la constitution d'un Conseil du trône et pour le départ du sultan Ben Arafa - Ajournement de la session extraordinaire de l'Assemblée algérienne - Constitution du second gouvernement Ben Ammar en Tunisie - En Afrique noire - Les élections législatives cambodgiennes
Afrique du Nord
Maroc
M. Gilbert Grandval, Résident général de France au Maroc, accusé par certains partis politiques représentés au Gouvernement d’avoir outrepassé le cadre de sa mission, a dû se retirer. Il a été remplacé par le général Boyer de la Tour. Le Comité ministériel des cinq a tenu, au cours du mois de septembre, de nombreuses réunions en vue de définir la politique marocaine du Gouvernement et de mettre sur pied son plan d’exécution.
Le général Catroux et M. Yrissou, directeur du Cabinet de M. Pinay, ministre des Affaires étrangères, se sont rendus à Madagascar le 4 septembre 1955 pour rencontrer l’ex-sultan Mohammed ben Youssef. Après une semaine passée en conférences, ils sont revenus en France porteurs de l’approbation de Mohammed ben Youssef en ce qui concerne la création d’un Conseil du trône et la constitution d’un gouvernement marocain représentatif. Pendant cette période les délégués de l’Istiqlal ont rencontré à Rome le leader nationaliste marocain Si Allal el Fassi et ont obtenu son accord pour la création d’un Conseil du trône. Une délégation du Parti démocratique de l’indépendance a gagné Madagascar le 10 octobre pour prendre contact avec Si Mohammed ben Youssef ; elle a été bientôt suivie d’une délégation de l’Istiqlal.
Le plan gouvernemental semblait donc en bonne voie de réalisation ; deux difficultés ont néanmoins surgi vers le milieu de septembre : l’impossibilité de trouver le troisième membre du Conseil du trône et l’opposition de certains milieux parlementaires français. Après plusieurs personnalités marocaines, le général Kettani s’est finalement récusé pour faire partie du Conseil du trône, malgré l’intervention du général Noguès, ancien Résident général de France au Maroc. Des conseils ont été prodigués au sultan Ben Arafa par certaines personnalités politiques pour qu’il affirme sa volonté de rester sur le trône. La mission d’un parlementaire français, président de la Commission de défense nationale de la Chambre, a dû être interrompue par la Présidence du Conseil parce qu’elle allait à l’encontre de la politique gouvernementale.
Le Gouvernement a finalement laissé au général Boyer de la Tour le soin d’obtenir le départ du sultan Ben Arafa et de trouver le « troisième homme ». Le Sultan s’est retiré à Tanger le 1er octobre 1955 en désignant un membre de sa famille comme gardien du Sceau, décision que les nationalistes marocains ont immédiatement dénoncée comme contraire aux négociations d’Aix-les-Bains.
La situation s’est brusquement aggravée dans les premiers jours d’octobre avec le soulèvement de certaines tribus proches de la frontière du Maroc espagnol. Quatre ministres ont donné leur démission le jour où le Président du conseil Edgar Faure décidait d’accepter la discussion à la Chambre des députés des affaires marocaines.
Algérie
Un décret en date du 30 août 1955 étendait l’état d’urgence à toute l’Algérie. Le même jour, neuf arrondissements nouveaux étaient créés dans les trois départements : 2 pour le département d’Alger, 3 pour celui d’Oran, 4 pour celui de Constantine.
M. Bourgès-Manoury, ministre de l’Intérieur, s’est préoccupé de mettre sur pied un plan d’action sociale en faveur des travailleurs algériens dans la Métropole. De vastes opérations de police ont eu lieu au cours du mois, à Paris et en province, contre les membres des organisations algériennes dissoutes. On déclare officiellement que le dispositif de sécurité actuellement en place en Algérie compte 120 000 hommes.
L’Assemblée algérienne devait se réunir le 28 septembre 1955 pour examiner le plan de réformes du Gouverneur général Soustelle ; mais la majorité des élus musulmans ayant déclaré qu’ils considéraient la politique d’intégration comme dépassée, M. Soustelle a décidé d’ajourner la session extraordinaire. Le Gouverneur général espère rallier à son plan une majorité parmi les représentants de la population musulmane avant la session ordinaire d’octobre de l’Assemblée algérienne. M. Edgar Faure a affirmé solennellement la volonté du gouvernement français de procéder à une intégration loyale et de s’opposer à tout séparatisme.
À l’ONU, l’Assemblée générale a mis en discussion l’inscription de la question algérienne ; M. Pinay l’a fermement mise en garde contre une intrusion dans les affaires internes de la France. Le 30 septembre 1955 l’Assemblée générale a décidé l’inscription par 28 voix contre 27. Le gouvernement français, à la suite de cette violation de la Charte, a décidé de ne pas participer aux travaux de l’Assemblée générale et a retiré sa délégation permanente.
Tunisie
Les grèves continuent à paralyser l’économie tunisienne et M. Tahar ben Ammar s’est longuement entretenu avec les membres du gouvernement français d’un plan d’aide économique.
Le deuxième gouvernement tunisien a été constitué par M. Tahar Ben Ammar. M. Salah Ben Youssef a regagné la Tunisie le 13 septembre ; M. Bourguiba a déclaré qu’il ne désespérait pas de le rallier à ses vues.
M. Robert Seydoux a été nommé Haut-Commissaire de France en Tunisie.
Afrique noire
Togo
Une mission de visite des Nations unies a séjourné au Togo au cours du mois de septembre. Elle a pu y constater l’attachement des populations à l’Union française, attachement qui s’est exprimé en particulier par le discours prononcé par le président de l’Assemblée territoriale. Il apparaît que cette mission sera la dernière du Conseil de tutelle, l’évolution du Togo étant jugée suffisante pour que les populations puissent décider librement de leur avenir.
Indochine
Vietnam
M. Foster Dulles, secrétaire d’État, ayant déclaré que les États-Unis sont d’accord avec le Gouvernement Diêm pour constater que les conditions existant dans le Nord-Vietnam ne sont pas actuellement propices à des élections libres dans le Vietnam tout entier, on souligne dans les milieux autorisés français que la France et la Grande-Bretagne, signataires de l’Accord de Genève, n’ont pas modifié leur position. Le Nord-Vietnam a engagé une campagne en faveur des élections générales en 1956.
Les combats continuent entre les troupes gouvernementales du Sud-Vietnam et les Binh-Xyuên au sud-est de Saigon, tandis que les accrochages se multiplient en Cochinchine avec les Hoa-Hao.
Cambodge
Les élections législatives cambodgiennes ont donné la totalité des sièges au parti de la Communauté socialiste populaire (Sangkum), présidé par le prince Norodom Sihanouk.
Le Congrès national khmer a décidé le 25 septembre 1955 d’amender la Constitution en remplaçant les termes « Cambodge, État faisant partie de l’Union française » par « Cambodge, État indépendant et souverain ». « Le peuple, a déclaré Sihanouk, décidera de la forme de ses relations avec la France. » ♦