L'auteur, qui s’est plus spécialement consacré aux problèmes de l’Europe centrale et orientale, a confié à la RDN une série d’articles qui, après un examen d’ensemble, présenteront successivement la situation actuelle, politique et économique, des démocraties populaires satellites de l’URSS. Celles-ci ont été, au cours des dernières années, le siège de drames sanglants ou obscurs et d’une évolution dont il importe de saisir la portée. Leur situation géographique et leurs possibilités humaines, les enjeux qu’elles représentent et les exemples qu’elles fournissent, leur confèrent une importance qui n’est contestée ni à l’Est ni à l’Ouest. La réunion annoncée de prochaines conférences internationales octroie à cette étude un caractère plus aigu d’actualité, en même temps que s’y trouve posée, dans sa diversité, l’ample et délicate question du satellitisme.
L’évolution générale des démocraties populaires depuis 1956
Les événements de l’automne 1956 en Pologne et en Hongrie ont pendant plusieurs mois agité l’opinion universelle. Gouvernements et organisations internationales s’en sont émus et préoccupés. Les partis communistes eux-mêmes en ont été momentanément ébranlés. Des volumes y ont été consacrés. D’innombrables articles ont en toutes langues, chacun à leur façon, exposé les faits, tenté d’en prévoir les conséquences. La plupart étaient plus lourds de questions que de réponses. Plus de deux ans se sont écoulés. Qu’est-il advenu des espoirs ou des craintes alors exprimés ?
Ces événements étaient dignes de retentissement. Après les grèves insurrectionnelles de Berlin en 1953 et l’agitation universitaire à Prague au printemps 1956, déjà elles-mêmes à la fois anti-russes et anti-soviétiques, les troubles de Poznan et le soulèvement de Budapest laissaient envisager un possible et prochain retour des satellites de l’U.R.S.S. à l’indépendance et à la liberté. Après tant de controverses sur le « containment » et le « refoulement », ne serait-ce pas du dedans et par leurs propres moyens que les États de l’Est européen allaient décrocher de Moscou ? La réponse à ces questions était d’importance. L’interminable dialogue entre l’Est et l’Ouest pouvait se découvrir un autre cours et l’Europe elle-même reprendre conscience de ses véritables dimensions. Aux six États de la petite Europe de l’Ouest pourrait se ressouder ce qu’on a pu appeler « l’Europe des dix pays absents ». Des États comme la Yougoslavie et la Finlande, aux limites il est vrai du bloc des satellites et du satellitisme lui-même, n’avaient-ils pas réussi chacun à sa manière, à se dégager d’un allié ou voisin trop puissant ? Si les nationalités, retrouvant leur histoire, parvenaient à affronter avec, succès la force russe, n’allait-on pas vers une progressive désintégration de l’immense et hétérogène Union Soviétique, et si au contraire l’échec se dessinait, la voie n’était-elle pas ouverte vers un nouveau recul de l’Europe ?
On sait déjà que Moscou a repris la situation en main. Mais les choses ne sont pas revenues à leur point de départ. De profondes modifications ont été apportées à la situation des démocraties populaires. Elles touchent à la fois leur état politique et leur structure économique. Un adroit processus, utilisant les circonstances, semble les avoir plus étroitement encore attachées au camp des « États socialistes ». Mais leur situation géographique, leurs caractères ethniques, leur niveau social, leurs traditions, leurs affinités, le souvenir même de leurs dissensions ne jouent pas en faveur d’une fatale et définitive intégration au bloc communiste européen et asiatique.
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