Cet article est extrait de la 2e partie d’un ouvrage à paraître sous ce titre aux Éditions du Seuil en novembre. L’auteur, qui a visité le pays, s’intéresse à l’envers du décor : la propagande du surpuissant Parti communiste et ses effets, ce qu’il appelle la « machine à changer l’homme ».
La Chine et son ombre
La distance, autrefois, offrait aux peuples une alternative de tout repos : ou bien ils ignoraient ceux qui vivaient sur les terres lointaines, ou bien ils les méconnaissaient ; le choix était indifférent, puisqu’il ne mettait point leurs intérêts en jeu. Le progrès technique a changé tout cela. Désormais, chacun doit s’efforcer de comprendre les besoins, les aspirations et les craintes de peuples même très lointains, tout comme s’il s’agissait de voisins. Il n’est plus de pays qui puisse s’offrir le luxe d’ignorer ou de méconnaître les autres, sans risquer de porter atteinte à ses intérêts propres et à sa sécurité.
On peut, de nos jours, prendre son petit-déjeuner à Pékin et dormir dans son lit si l’on habite dans une capitale occidentale. Les missiles vont encore beaucoup plus vite. Le facteur temps n’existe pas pour les véhicules des idées. En fait, tous ces bouleversements se sont opérés avec une telle rapidité, qu’on n’a plus le temps de réparer les négligences accumulées dans le passé. Rien cependant ne serait plus urgent que de le faire à propos de la Chine. Ce n’est pas seulement parce que la Chine représente le quart de l’espèce humaine, et que ce quart d’humanité obéit à un gouvernement central et fort. Pas seulement parce que la Chine est en train de devenir une grande puissance industrielle et militaire. Mais aussi et surtout parce que la Chine est destinée à jouer, dans un très proche avenir, un rôle de plus en plus important dans les affaires internationales.
Pour ce qui est des Chinois, l’histoire les a forcés à se familiariser avec les aspects essentiels des méthodes et des moyens de l’Occident. Par contre, l’Occident a pu se permettre de ne s’intéresser qu’aux traits de la pensée et de la culture chinoise qui l’attiraient. Or, on ne peut plus attendre pour combler les lacunes de la connaissance mutuelle, et nous avons, nous autres, à les combler au moment le moins favorable à l’Occident.
Il reste 95 % de l'article à lire
Plan de l'article